: Jean-Michel Lemonnier, bloc-notes: géographie du sacré
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samedi 8 mars 2014

Chateaubriand, Haute-Bretagne, croix de saint Michel-Belenos...et autres sites sacrés (I)

François-René de Chateaubriand et sa description romantique de ses promenades en ce lieu mythique qu'est le Mont-Dol, au moment où il est pensionnaire au collège de Dol-de-Bretagne.

Chateaubriand évoque ici, un pan de l'histoire des pays du nord de la Haute-Bretagne, méprisée par les Jacobins. L'écrivain situe, par ailleurs, la forêt de Brocéliande sur un territoire s'étendant du nord de l'actuelle Ille et Vilaine  à partir du pays de Saint-Malo jusqu'à  Rennes au sud en passant par Dol et Combourg, et délimitée à l'est par la forêt de Fougères et à l'ouest par un "axe" reliant Dinan à Bécherel (la question de la localisation de la forêt de Brocéliande fait toujours débat). Chateaubriand raconte qu'au XIIe s., cette forêt servit de champ de bataille aux Bretons de Domnonée luttant contre les Francs. La Domnonée est cette zone qui vit débarquer au VIe des Bretons insulaires fuyant les invasions anglo-saxonnes. C'est cet espace qui s'étend du Trégor au pays de Dol, traversant le Goëlo et le Penthièvre, autrement-dit l'essentiel de la côte nord de la Bretagne qui constitua un royaume fondé par le Breton Riwal au VIe s.

(Scans : Mémoires d'outre-tombe (Tome I), 1849, de François-René de Chateaubriand)


A quel autre écrivain faudrait-il faire appel pour trouver plus beau tableau de ces pays du nord-est de Haute-Bretagne ? Ecriture, manifestation d'un inconscient bouillonnant projeté sur le réel, plus qu'une description froide d'un paysage élaborée par un géographe prosaïque, ces pages parlent, en tout cas, certainement bien plus à l'autochtone sensible aux lieux, dont les ancêtres s'installèrent sur ces terres il y a des siècles et des siècles de cela qu'à une personne étrangère aux endroits dépeints...même si cette dernière aura peu de mal à s'immerger dans cette géo-histoire, cette nature bretonne (anthropisée depuis des millénaires mais violentée comme jamais depuis l'après-guerre) et à l'investir étant donné l'inimitable façon, propre à ce génie né à saint-malo en 1768, de (d-)écrire et de nous faire voyager avec lui. 
Enfin, celui pour qui un territoire n'est que le support matériel de son existence n'entendra, évidemment, rien à toutes ces considérations...


Ci-dessous, un extrait de l'ouvrage  de P. Bézier  "Inventaire des monuments historiques du département d'Ille et Vilaine" édité en 1883 dans lequel est mentionné l'antique chapelle dédiée à saint Michel Archange située au sommet de Mont-Dol. Le Mont-Dol (1)est un de ces 
sites remarquables, à l'histoire oubliée, constituant un des points formant la grande croix de saint Michel qui est également la croix de Belenos signant la terre bretonne (Voir notre article du 27/10/2013)




Au sommet du Mont, une pierre attire l'attention du visiteur. Elle a la particularité de porter une marque suffisamment atypique  pour se voir attribuer une origine suprahumaine. "Griffe du Diable", "patte du Diable", "pied du Diable" étant les dénominations les plus fréquentes pour la qualifier. Plus rarement, le stigmate porté par le rocher est attribuée à l'action de l'Archange Michel. 
Dans tous les cas, ce que nous dit l'attention portée à ce rocher et à cette signature, c'est que chaque fois que l'être humain rencontre un "objet" ou un "sujet" remarquable disons singulier, il l'inclut dans un récit mythique pour expliquer sa "venue au monde". Et dès que ce récit perd son caractère acceptable, il devient légende (cf. Infra).
C'est bien le cas ici, au Mont-Dol et de fait au Mont Saint-Michel (l'histoire des deux monts étant liée) avec ce récit mythique narrant le combat entre le chef des milices célestes Michel et Satan qui explique l'état de la pierre. Un combat mythique, c'est-à-dire toujours renouvelé (éternel), toujours d'actualité...pour le croyant en tout cas.
 A travers, ce mythe -tardivement devenu légende face au recul du paganisme et de l'acceptation des croyances chrétiennes parmi le peuple- c'est bien sûr,  la christianisation des monts (voir le récit chrétien de la fondation du Mont St-Michel par l'évêque d'Avranche) et la volonté de diaboliser des croyances païennnes qui nous sont présentées. 


(1) Il y a 7500 ans, à la fin de la dernière glaciation, le Mont-Dol était un île et il y a 30000 ans le Mont-Saint-Michel, très au sud dans les terres par rapport à la mer,  était parfaitement émergé.

à suivre...

ARTICLES LIES :

vendredi 13 juillet 2012

Campagne transylvaine, Carpates méridionales : scènes de l'été 2009



"La campagne roumaine est une autre Lombardie, non certainement par la perfection de l'agriculture, mais par l'exubérance du sol et par la beauté des ciels lointains." 
Reclus (E), 1876, Nouvelle Géographie Universelle, I. L’Europe méridionale

 Cette citation n'a que très peu perdu de sa pertinence pour ce qui concerne les Carpates méridionales en ces premières années  du XXIe siècle, malgré l'entrée du village roumain dans la (post-)modernité (?)...















Photographies : Jean-Michel Lemonnier,  2006-2009
Départements de Brasov, Covasna, Harghita, Carpates/Transylvanie...



mercredi 30 mai 2012

Carpates méridionales, Transylvanie : scènes de l'été 2009 et hiver 2011




"Vivre à la campagne signifie vivre dans une perspective cosmique et avec la conscience d’une destinée liée à l’éternité" Lucian Blaga, 1936


Le village roumain est le monde, la patrie des origines... espace sacré, territoire des parents et des ancêtres, territoire des morts et des vivants, géniteur de la Tradition... 
ţara en roumain signifie aussi bien pays que campagne... la culture roumaine et le peuple roumain sont bien nés là, dans cet espace rural-matrice dont la disparition, sous sa forme traditionnelle, maintes fois annoncée et programmée mais toujours repoussée, paraît désormais inéluctable... à voir...





Monde rural transylvain, scènes... Photographies : J-M Lemonnier

jeudi 17 mars 2011

Géographie du sacré : le village roumain...

« Le village (Roumain) ne se situe pas dans une géographie purement matérielle et dans le réseau des déterminants  mécaniques de l’espace, comme la ville ; au regard de sa propre conscience, il se situe dans le monde et se prolonge dans le mythe. » Lucian Blaga, 1936