: Jean-Michel Lemonnier, bloc-notes: România
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mercredi 25 juin 2014

Obiceiul Dragaica


                                                                                                                                                                         

mardi 24 juin 2014

Les fêtes du 24 juin en régions historiques de France et de Roumanie...


"Il faut qu'il croisse et que je diminue." (Jean 3, 22-36). Allusion au Christ dans les Evangiles, considérée dans la tradition populaire comme une référence au parcours du Soleil. Vers le Ve siècle, l'Eglise récupère la fête païenne des feux du solstice d'été, placée désormais sous le signe de saint Jean le Baptiste... Récupération ou continuité, c'est selon... Saint Jean-Baptiste occupera désormais la place du Dieu solaire, commun à de nombreuses traditions païennes ancestrales...


Fête de la Saint-Jean, Bretagne, autrefois...
source non identifiée


Dragaica ou fête des Sânziene, fête traditionnelle de la fleur-fée en Roumanie, les 23 et 24 juin.
Diana de Sarmizegetuza, une déesse daco-romaine (Diana est d'abord la déesse romaine équivalente de l'Artemis grecque), est devenue Sînziana ou Sânziana (Sancta Diana), personnage de la mythologie (daco-)roumaine après la romanisation. Diana ou Diane est, par ailleurs, devenue la "sainte" patronne des sorcières. Originairement déesse romaine, elle s'est transformée en soeur-épouse de Lucifer sous l'influence chrétienne du fond mythologique païen européen. Célébration d'un culte solaire (saint Jean), rituel de fertilité...Les Sânziene sont à la fois des fleurs et des fées (Zânele). Elles sont confondues parfois avec les Iele. Mais les premières sont considérées comme gentilles contrairement aux secondes qui seraient malveillantes. Le coucou accompagne l'arrivée de l'été. L'oiseau commence à chanter le 25 mars, qui est évidemment le jour de l'Annonciation et se taît au moment du solstice d'été...Cette fête est assurément un héritage de la protohistoire...
Pour comprendre l'histoire détaillée et la symbolique complexe de cette fête, voir  La Roumanie : mythes et identités (les survivances païennes dans les traditions roumaines)



Crédit photo

samedi 7 juin 2014

Bartok - Six romanian folkdances - Allegro Barbaro



Les gammes populaires et le système chromatique dans l'oeuvre de Bela Bartok
J. Kárpáti
Studia Musicologica Academiae Scientiarum Hungaricae
T. 11, Fasc. 1/4, Bence Szabolsci, Septuagenario (1969), pp. 227-240
Published by: Akadémiai Kiadó
Article Stable URL: http://www.jstor.org/stable/901280


Quatre-vingts ans après Bartok : pratiques de terrain en Roumanie
Jacques Bouët and Bernard Lortat-Jacob
Revue de Musicologie
T. 81, No. 1 (1995), pp. 5-24
Published by: Société Française de Musicologie
Article Stable URL: http://www.jstor.org/stable/947347


samedi 17 mai 2014

Manastirea Banceni 1/6 (+playlist), le Père MIHAIL JAR, saint soldat du Christ



Documentaire extraordinaire en 6 parties sur le monastère orthodoxe de Banceni situé en Ukraine à quelques kilomètres de la frontière avec la Roumanie et sur le père-Abbé Mihail Longhin Jar. Mihail a 32 enfants et en a adopté 29. 

200 enfants orphelins, parfois très gravement malades et handicapés, vivent sur le domaine du monastère, sur lequel l'abbé a créé un véritable village pour les accueillir.

Il incarne réellement, ici et maintenant, la parole du Christ.

Un cas similaire en Roumanie :


lundi 17 mars 2014

Quelques mots sur l'histoire de la Roumanie durant la seconde guerre mondiale : tragédies et lâchetés diverses


"La Roumanie a une contribution insigne à la fin de la guerre" (Radio New-York, 18 septembre 1944)

Le passage de la Roumanie dans le camp des alliés "a produit un renversement du front extrêmement dangereux qui ménerait non seulement à la perte de La Roumanie mais aussi à celle de la Bulgarie, de la Yougoslavie et de la Grèce, mettant en danger toute l'armée allemande des Balkans" d'après Keitel et Guderian, maréchaux allemands dans un rapport envoyé à Hitler

Et pourtant...

Malgré ce fait historique décisif évident, la Roumanie n'a pas été "récompensée" par les vainqueurs de la seconde guerre mondiale. En réalité, elle aura été constamment manipulée par les grandes puissances de la fin des années 30 jusqu'à l'invasion soviétique à la fin de la guerre. 

Carol II et sa camarilla laisseront faire les nazis et les soviétiques qui dépècent la Roumanie en 1940. Hitler impose le diktat de Vienne et oblige la Roumanie à revoir ses frontières de 1918-1920 (Union et Traité de Trianon) également avec la Bulgarie et la Hongrie. La Roumanie est parfaitement isolée après la défaite française de 1940, totalement impuissante face aux visées irrédentistes de ses voisins. 

Le Roi Carol II finit par laisser sa place (il ne prononcera jamais le mot abdication) à son fils Michel Ier sur ordre du Maréchal Antonescu (1), héros de la première guerre (le "Pétain roumain") qui crée l'Etat national-légionnaire en formant une coalition éphémère avec la Garde de Fer (2) ou mouvement légionnaire du défunt Codreanu assassiné en 1938 sous le règne de... Carol II. Hitler fait miroiter à Antonescu -qui n'adhère pas au nazisme rappelons-le-  la récupération des territoires perdus et lui laisse administrer la Transnistrie (pas d'annexion roumaine).

Guerre sainte contre le bolchévisme, timbre roumain de 1941
Or donc, du pacte Molotov-Ribbentrop à l'accord Churchill-Staline en 1944, le bilan est catastrophique sur plusieurs points. La Grande Roumanie (2) (la Roumanie intégre ou complète) disparaît, laissant la place à une Roumanie amputée de la Bessarabie et de la Bucovine, soit une perte territoriale d'environ 58000 km2.  
La coût humain de la guerre est monstrueux : presque 800000 morts. L' économie du pays est ruinée, ses ressources naturelles dévastées et, cette Roumanie qui rejoint pourtant le camp allié à la fin de la guerre est dans  l'obligation d'entretenir l'armée d'occupation soviétique et de payer des réparations aux vainqueurs. De plus, l'URRS se servira de la chair des soldats roumains en les envoyant au front exposés en première ligne contre les Allemands après 1944. Et encore, la Roumanie devra fournir 100000 ouvriers à l'URSS, des Saxons ou des Souabes, i.e. principalement la minorité allemande de Roumanie/Transylvanie. Ils seront déportés en Sibérie qui sera un tombeau pour beaucoup...

Et ce, malgré les tentatives du roi Michel Ier (Roi "sous tutelle" de 1927 à 1930 puis en septembre 1940 alors qu'il n'a que 19 ans) d'apaiser les souffrances de son peuple en engageant des négociations avec  les Alliés pour obtenir une capitulation "exclusive" face aux Anglo-étasuniens et en déclarant la guerre aux puissances de l'axe le 23 août 1944 (cf. infra Dialogue entre Antonescu et le Roi) une fois Antonescu destitué. En vain, la Roumanie est aux mains des Soviétiques en 1944. La "Grande Roumanie", tellement prometteuse sur le plan culturel notamment (voir la période l'entre-deux-guerres) et promise à devenir une puissance européenne importante devra subir une soviétisation-satellisation forcée...au moins jusqu'au règne du francophile Ceausescu qui tentera de réhabiliter des figures importantes de la scène culturelle roumaine et mondiale  et faire "rentrer au pays" certaines d'entre elles (en vain...)...Enfin, faut-il rappeler que le P.C.R. accueillit en son sein de nombreux fascistes roumains après accords passés avec Ana Pauker ministre communiste juive orthodoxe ? Une Ana Pauker accusée ensuite de "déviance dextriste" (!) et "excommuniée" lors du tournant antisémite des partis staliniens au début des années 1950. 



(1) En "Occident", le conducator est, la plupart du temps, perçu comme un fasciste, antisémite virulent. En Roumanie, le regard porté sur ce personnage diverge sensiblement de cette vision...La preuve avec cettte série d'articles  récents publiés dans une revue roumaine d'histoire... Lien vers : Ion Antonescu, fut-il un héros ? Impensable que des historiens français puissent, simplement, poser la même question au sujet de Philippe Pétain...
(2) Le programme politique et disons la "vision du monde" des membres de la Légion de l'archange saint Michel de Codreanu n'avait, in fine, que peu à voir avec le gouvernement de soudards de Ion Antonescu qui ne fut à tout dire  qu'un opportuniste 
(3) Le Traité de Trianon en 1920 officialise l'Union de tous les pays roumains. Le géographe français Emmanuel de Martonne sera chargé du traçage des frontières du Royaume

dimanche 1 décembre 2013

1er décembre-Fête nationale de la Roumanie



Ardeal=principauté de Transylvanie (historique)
 "Bataillons roumains, traversez les Carpates. La Transylvanie nous appelle !"

La Roumanie avant et après 1918 

De la "Regele playboy" la "Caînele rosu" -Pierderea Romaniei Mari  
 Du "roi playboy" (NDA : le roi Carol/Charles II, coureur de jupons) au "chien rouge" (NDA : Ceausescu) -La perte de la Grande Roumanie

"Cei 22 de ani de existenţă ai României Mari (1918-1940) reprezintă, probabil, cea mai fastă perioadă a istoriei noastre."
"Ces 22 années d'existence de la "Grande Roumanie (1918-1940) représentent, probablement, la période la plus faste de notre histoire"

România interbelica  

Extension maximale du territoire roumain



Hymne national roumain
Desteapta-Te, Române ! Eveille-Toi, Roumain !

Éveille-toi, Roumain, du sommeil de la mort
Dans lequel t'ont plongé les barbares tyrans.
Maintenant ou jamais construis-toi un autre destin
Devant lequel se prosterneront aussi tes cruels ennemis.


Maintenant ou jamais montrons au monde
Que dans ces veines coule toujours un sang romain
 Et que dans nos cœurs nous gardons avec fierté un nom
Triomphant dans les batailles, le nom de  Trajan !


Regardez, ombres grandioses, Michel (1), Étienne (2), Corvin (3)
La nation roumaine, vos descendants,
Avec les bras armés, avec votre feu dans les veines,
Tous crient : "Vivre libres ou mourir!".


Prêtres, avec la croix devant ! car l'armée est chrétienne,
Sa devise est liberté et son but est sacré,
Mieux vaut mourir glorieusement en combattant,
Que d'être encore des esclaves sur notre terre ancienne !
 
(quatre strophes chantées lors des événements officiels)

Très beau chant romantique et patriotique écrit en 1848, accompagnant le mouvement d'émancipation national roumain. Les "barbares tyrans" sont les différents envahisseurs qui occupèrent les pays roumains au fil des siècles : Ottomans, Austro-Hongrois, Russes...

montage Lemonnier 
Les vers du poème ("un rasunet", un retentissement) d'Andrei Muresanu  qui deviendra chant révolutionnaire puis hymne national. La "Marseillaise roumaine" selon l'historien N. Balcescu. La Marseillaise
Interdit par le pouvoir communiste à partir de 1947->1948. Ceausescu lèvera l'interdiction et la composition (uniquement la mélodie) pourra être jouée en public durant son règne, sans pour autant devenir l’hymne de la République socialiste.
Plusieurs hymnes durant la période socialiste : de 1948 à 1953 "Zdrobite cătuşe", puis  "Te slăvim, Românie!" jusqu'en 1977, qui sera finalement remplacé par "Trei culori". "Desteapta-te, române"  est adopté comme hymne national par le "nouveau" pouvoir après la contre-révolution de 1989.  "Trăiască Regele" fut l'hymne (de 1866 à 1948) de l'union des principautés de Valachie et de Moldavie (Principautés unies de Moldavie-Valachie, des "deux" principautés de Roumanie ->1862-1866 et 1866-1881) réalisée grâce au prince Cuza, fondateur de l’État roumain moderne (1859), puis hymne du royaume de Roumanie (1881-1948).  

(1) Mihai Viteazul-Michel le Brave  (2) Stefan cel Mare-Etienne le Grand (3) Matei Corvin-Mathieu Corvin

vendredi 22 novembre 2013

Stefan Hrusca - Isus s-a nascut in seara de Craciun (Colinde-Chanson de Noël) - Roumanie




Depuis quelques jours, nous sommes entrés dans la période de "carême de Noël" (40 jours avant la fête de la nativité) (1) chez les chrétiens orthodoxes roumains, bulgares, ou encore (parmi d'autres) chez ceux, qui en France, sont rattachés à la Métropole (Mitropolia) Orthodoxe Roumaine d'Europe Occidentale et Méridionale, diocèse de l’Église orthodoxe roumaine (le patriarcat de Roumanie). Pour déterminer les dates fixes de l'année liturgique, c'est le calendrier grégorien qui est utilisé, en ce qui concerne la date de la fête de Pâques, on utilise le calendrier julien. En somme, Roumains, Bulgares, Grecs et d'autres croyants résidant dans des États où l'orthodoxie n'est pas majoritaire comme en Pologne, Turquie, Égypte etc. fêtent Noël le 25 décembre contrairement à d'autres orthodoxes comme les Russes ou les Serbes qui célébreront la naissance de Jésus-Christ le 7 janvier.

(1) Diffère de l'Avent (c'est-à-dire la "venue") des catholiques romains qui débute 4 semaines  avant Noël, le premier dimanche du mois de décembre.

lundi 23 septembre 2013

Le paysan roumain, homme religieux




"Tu viens et tu nous dis: vous êtes les derniers paysans en Europe/au monde, vous devez disparaître. Moi, je te dis: pourquoi ne serait-ce pas toi le dernier con au monde et que ce serait à toi et non à moi de disparaître ?" (traduction libre, vidéo)


Le paysan (pas l'agriculteur moderne areligieux (1) et "destructeur") roumain (2), homme religieux, en solidarité mystique avec les rythmes cosmiques, croit au Christ Pantocrator qui descend sur terre (3) pour rendre visite aux paysans. Une croyance qui renvoie à un christianisme cosmique (christianisme populaire) et dominée par la nostalgie d'une nature sanctifiée par la présence de Jésus-Christ. Le paysan est "homme véritable" car il se conforme à l'enseignement des mythes (mythos, c'est la parole vraie), à des modèles exemplaires venant de ses ou de son dieu. Il est, à la fois, allié et auxiliaire de Dieu car c'est un créateur. En effet, en prenant possession d'un lieu, il transforme le chaos en cosmos. Il participe à l'instauration d'un ordre cosmique. Il faut donc bannir l'idée selon laquelle l'homo religiosus fuirait l'histoire en cherchant un refuge dans le sacré, le "religieux mythique". Au contraire, il s'y implique pleinement en combattant, sans cesse, par la ritualisation, notamment, des "forces" du chaos qui peuvent condamner son monde. Tout cela suppose que pour le paysan-religieux, le temps et l'espace sont forcément hétérogènes. Pour lui, il existe donc un Temps sacré, mythique et réversible d'une part et un temps profane, ordinaire, historique et irréversible d'autre part. L'homme religieux fait aussi l'expérience et a conscience de l'existence  d'espaces de "qualités" différentes, autrement dit d'un espace fait de ruptures : l'espace sacré et réel et l'espace profane, irréel, "amorphe" et chaotique, quotidien, où l'homme subit des "obligations". Le paysan cherche à retrouver ou réintégrer l'aurore cosmogonique, c'est-à-dire qu'il réactualise un événement s'étant déroulé in illo tempore en construisant sa maison par exemple. Celle-ci est conforme à un prototype céleste ou cosmique. L'espace profane qui n'était que chaos devient, par incidence, un espace sacré et centre du monde. L'homme religieux crée ainsi son propre monde et en veillant à la survie de celui-ci, il assure la sienne. 

Que l'on compare simplement le rôle assigné à une habitation moderne selon le furieux techniciste Le Corbusier et son '"habitat fonctionnel" et concentrationnaire (4) ou selon n''importe quel architecte-urbaniste qui doit obligatoirement satisfaire à la "nécessité capitaliste" moderne, avec celui dédié à une demeure selon l'homo religiosus et on comprendra ce qui différencie une existence moderne d'une existence traditionnelle

Or donc, à travers ces croyances et surtout cette Weltanschauung ou vision du monde, on peut identifier une révolte passive du paysan donc de l'homme religieux  contre les agressions de l'histoire, les guerres, les invasions (5) les dominations imposées par différents "maîtres". L'histoire -le temps irréversible- est la plus grande menace pour l'homme religieux dont les derniers paysans roumains authentiques présentent, encore de nos jours, quelques unes de ses qualités. En s'inscrivant dans une perspective cosmique, les sociétés paysannes ou agricoles traditionnelles d'Europe centrale et orientale (pacifiques la plupart du temps) se révoltent (ou se révoltaient...) alors contre une histoire tragique et injuste... Elles luttent contre le temps historique destructeur et cherchent à contrer son irreversibilité.

______________________

(1) Même si l'homme fondamentalement a-religieux, donc moderne ou post-moderne est rare, peut-être introuvable, il se différencie de "l'homme religieux authentique conscient" de part son absence de solidarité avec la nature et le cosmos. 

Plus l'homme est religieux, plus il a de modèles exemplaires inspirés des dieux, moins il l'est, moins il possède de ces modèles, plus la place du "profane" est grande et plus ses activités deviennent "aberrantes" puisque ces dernières ne correspondent à aucun modèle transhumain. Le passage d'une vision traditionnelle ou archaïque du monde à une vision  moderne désacralisée est donc une effroyable dégradation du sens de l'existence humaine...

En outre, qu'on ne confonde surtout pas le moderne (agriculteur ou non) installé à la "campagne" (on ne discutera pas du terme employé) qui vit dans un monde désacralisé avec le paysan des dernières communautés agro-pastorales traditionnelles est-européennes...

(2) Ce n'est évidemment plus le type dominant, même en Roumanie et en Europe centrale et orientale plus généralement.

(3) Il s'agit là de la hiérophanie suprême, le dieu qui se fait homme et s’incarne de fait dans l'histoire. Se référer à (toute) l’œuvre d'Eliade : "Aspects du mythe", "Le sacré et le profane", "La nostalgie des origines", "Le mythe de l'éternel retour", "Mythes, rêves et mystères", etc.

(4) les "utopies" actuelles, certes moins ambitieuses mais tout aussi "involuées",  telles la "ville durable"/normes HQE, etc. appartiennent au même "inconscient moderniste" anti-traditionnaliste.

(5)  à ce propos les pays roumains, de par leur position au sein de l'espace eurasiatique, ont constamment eu à subir les agressions des différents empires voisins (ottoman, russe, austro-hongrois puis soviétique) mais aussi celles des mouvements migratoires de différents peuples  (Mongols, Slaves, Tatars...) et aujourd'hui celles de l'impérialisme occidentiste (capitalisme-démocratie-communisme) ou occidentaliste/atlantiste (euro-étasunien).

mercredi 15 août 2012

Braşov "ville martyre" (Braşov "oraş martir") et son "champ des morts"...

Ce court article complète les analyses produites dans un des chapitres de "La Roumanie : mythes et- identités, Ed. du Cygne , 2012

 Braşov (judet de Braşov , région historique de Transylvanie) est considérée comme la ville où la résistance anti-communiste fut la plus virulente à l'intérieur du "bloc socialiste" est-européen. Cachés dans les montagnes environnantes avec la complicité de la population rurale, certains résistants n’ont jamais abandonné la lutte avant la "victoire" définitive de 1989.  La ville s'inscrit dans une vallée des Carpates au centre de la Roumanie et a bénéficié d'une situation originelle stratégique car épousant une des grandes routes historiques qui reliait le Bas Danube à l'Europe Centrale. L'espace proche de l'agglomération (le mont ou colline Tâmpa rejoignant la vaste zone carpatique méridionale) a, à l'évidence, contribué à préserver ce bastion de combattants montagnards.
Deuxième ville de Roumanie à se soulever après Timişoara, Braşov compte un cimetière (cimitirul eroilor) consacré aux 66 habitants de la ville morts lors de la Révolution de 1989. Le cimetière est implanté au sein d'un mail vert, en plein centre-ville.

Cimitirul eroilor, le cimetière des héros à Braşov. Photographie Lemonnier, 2008

Ce "champ des morts" s'intègre donc dans un parc où se côtoient parterres fleuris, pelouses et ligneux. Les tombes en marbre blanc s'arrangent, donc, d'une couverture végétale verdoyante dès les premiers jours de printemps. La symbolique des couleurs est, alors, facilement interprétable. Le blanc couleur de la paix et le vert couleur de l'espoir, rappellent les teintes du cimetière militaire américain de Colleville-sur-Mer en Normandie. La position centrale du cimetière-volonté des pouvoirs publics-au sein de l'espace urbain brasovean renforce, effectivement, cette "symbolique de la victoire" et donne l'impression d'un lieu où reposent des héros, des "martyrs"... Nous sommes, certainement ici, sur le territoire des vainqueurs tombés pour mettre à bas un pouvoir dont l'arbitraire et la violence symbolique et réelle -surtout dans ses dernières années d'existence- supportent sans doute peu de comparaisons, même avec les autres régimes des anciennes "démocraties populaires" d'Europe centrale et orientale...Néanmoins, nous savons que l'ère postcommuniste roumaine a été  grande de déceptions... La crise économique récente n'a fait que renforcer cette situation...  Le gouvernement roumain devra désormais répondre aux injonctions d'instances supranationales telles le Fond Monétaire International, la Banque Mondiale et d'autres bailleurs de fonds... Cette soumission progressive à la doxa néolibérale n'étant que l'acmé d'un processus qui débute en 1990 et passe par une intégration à l'Union européenne à marche forcée...

Or donc, avant les "événements décisifs" de la fin de l'année 1989, Braşov s'illustre par ses grèves ouvrières. Celles-ci sont soutenues par des universitaires et la minorité hongroise de Transylvanie(1). Elles finissent par dégénérer en émeutes le 15 novembre 1987...Les revendications salariales des ouvriers de l'entreprise Autocamioane Braşov ne sont, en réalité, qu'un prétexte à une contestation radicale du système en place. Les bureaux du Parti sont pillés et une partie des archives de la Securitate détruites.
Silviu Brucan(2), membre du Parti Communiste Roumain, reconnait le lien entre la pénurie alimentaire qui sévit à l'époque avec la révolte de Braşov . Cette déclaration constitue un véritable aveu d'impuissance du régime du Conducator face à la grogne populaire qui se fait entendre progressivement dans tout le pays :
 " La manifestation des travailleurs à Braşov [ouvre] une période de crise […] dans les relations entre le parti communiste et la classe ouvrière sur lesquelles reposait jusqu’à une époque récente la stabilité politique du régime. […] Le parti était en mesure de contrôle avec succès la masse des travailleurs parce qu’il était devenu populaire dans les années 60 lorsqu’une amélioration s’était faite sentir dans l’économique roumaine et dans le niveau de vie de près de trois millions de paysans qui avaient rejoint la force de production industrielle urbaine. […] dans les années 1980, cependant, leur situation est allée de mal en pis. La détérioration de la situation économique a conduit à la perte de confiance des travailleurs dans le Parti, à la rupture entre la société civile et le Parti. "
(in C. Durandin, D. Tomescu, 1988, La Roumanie de Ceausescu)

La riposte face aux émeutiers est radicale. L'armée roumaine intervient dans les rues de Braşov . Certains émeutiers sont "déportés", mais aucun mort en lien avec cette révolte ne sera pourtant " recensé"... Après "l'incident", le régime (national)communiste de Ceauşescu survivra péniblement deux ans de plus avant le début de "l'acte final" que constitue l'insurrection populaire de Timişoara du 16 décembre 1989...

(1)Les Hongrois de Transylvanie considèrent leur culture en péril du fait de la mise en place de la politique de "systématisation" souhaitée par Ceauşescu (regroupement de l'habitat disséminé et par suite construction de blocs d'immeubles : "la ville à la campagne", augmentation des surfaces cultivables). Or les Hongrois vivaient principalement dans des villages faiblement peuplés, ce qui aurait (et a en partie) empêché (entre autres) le maintien des établissements scolaires réservés aux Hongrois et par suite la disparition progressive de la culture magyare sur ces territoires.

(2) En 1988, il effectue-on ne sait trop comment il y parvient-un séjour de 6 mois aux États-Unis d'Amérique et rencontre également Michel Gorbatchev dans les années 80...
 
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vendredi 13 juillet 2012

Campagne transylvaine, Carpates méridionales : scènes de l'été 2009



"La campagne roumaine est une autre Lombardie, non certainement par la perfection de l'agriculture, mais par l'exubérance du sol et par la beauté des ciels lointains." 
Reclus (E), 1876, Nouvelle Géographie Universelle, I. L’Europe méridionale

 Cette citation n'a que très peu perdu de sa pertinence pour ce qui concerne les Carpates méridionales en ces premières années  du XXIe siècle, malgré l'entrée du village roumain dans la (post-)modernité (?)...















Photographies : Jean-Michel Lemonnier,  2006-2009
Départements de Brasov, Covasna, Harghita, Carpates/Transylvanie...



mercredi 30 mai 2012

Carpates méridionales, Transylvanie : scènes de l'été 2009 et hiver 2011




"Vivre à la campagne signifie vivre dans une perspective cosmique et avec la conscience d’une destinée liée à l’éternité" Lucian Blaga, 1936


Le village roumain est le monde, la patrie des origines... espace sacré, territoire des parents et des ancêtres, territoire des morts et des vivants, géniteur de la Tradition... 
ţara en roumain signifie aussi bien pays que campagne... la culture roumaine et le peuple roumain sont bien nés là, dans cet espace rural-matrice dont la disparition, sous sa forme traditionnelle, maintes fois annoncée et programmée mais toujours repoussée, paraît désormais inéluctable... à voir...





Monde rural transylvain, scènes... Photographies : J-M Lemonnier

dimanche 27 mai 2012

Une société roumaine entre deux feux...

 Quelle chance a celui ou celle qui peut assister à une cérémonie chrétienne orthodoxe, de rite byzantin dans une église en Roumanie (dans notre cas) -qui peut durer jusqu'à sept heures à certains moments de l'année liturgique- ou bien encore observer ces hommes et ces femmes, souvent jeunes et parfois très pauvres, prendre le temps d'embrasser, avec recueillement, chacune des icônes présentes dans une église qui en compte parfois plusieurs dizaines, et les voir se signer devant chaque lieu de culte (orthodoxe ou non)  qu'ils rencontrent , pour se rendre à l'évidence que la jeunesse véritablement subversive est là-bas, à l' "Est" (1)... Même s'il ne s'agit pas de toute la jeunesse roumaine, dont une bonne part est parfaitement hypnotisée par le mode de vie de ce que nombre d'habitants des ex-démocraties populaires nomment "Occident".

Et, il faut encore se laisser surprendre par le regard presque extatique et apaisé de ces personnes, une fois leurs actes de dévotion accomplis pour comprendre à quel point celui des jeunes (et moins jeunes) occidentaux est éteint... Gavés et blasés de "tout", parfaits aliénés de notre société anomique, prisonniers d'une existence de laquelle tout sens supérieur a été évacué et d'une réalité toujours réduite au seul monde sensible, cette jeunesse ou plus généralement cette société occidentale "compense" alors souvent par des comportements d'extraversion, "hystériques", nihilistes (le nihilisme réactif au sens nietzschéen) faux élan vital cachant une peur atroce de la mort..

Par incidence, nous sommes en mesure d'évaluer l'apport constitué par ce modèle occidental, sur une autre partie de cette jeunesse roumaine, plutôt "urbaine" en rupture croissante avec la première citée, victimes plus ou moins consentantes d'un  libéralisme-libertaire, i.e. une idéologie aussi parfaitement séduisante que réactionnaire annihilant toute possibilité de d'émancipation véritable. Une population plutôt jeune, donc, séduite par une absence de contraintes (ou bien plutôt par cette idée) qui leur permet, certes, de contribuer à tisser les liens de ce monde d'interdépendances entre les nations et les territoires, mais qui les prépare, à n'en pas douter, à un avenir de souffrances fait de reniements, déracinements, et d'oubli de leurs identités, individuelle et collective.

Il ne s'agit pas de faire l'apologie aveugle du christianisme orthodoxe (que nous pouvons considérer comme une forme de résistance populaire) ou d'un mode de vie que nous aimerions à considérer comme "traditionnel" et "salutaire" ou "salvateur". Mais, face à ces individus occidentaux qui par esprit de système, rejettent toute idée de transcendance ou refusent toute considération sur la question du "saint" ou du  "sacré", séduits par un individualisme trompeur et cette illusion d'être libres largement entretenue par les mass médias, mais aussi tellement persuadés de détenir la clé de l’univers, la "clavis absconditorum" interdisant toute conversation avec eux, au moins pouvons-nous poser la question de savoir si la société roumaine, dans son ensemble, sinon fascinée, au moins attirée par le mode de vie occidental dominant, pensant se libérer du poids des traditions et de la "coutume" ne renonce pas à une bonne part d'elle-même...


Une telle question est, bien sûr, nulle et non avenue pour les chantres du "tout économique" (autrefois socialistes devenus (néo)libéraux sans états d'âme) et de la rationalité pour qui le but premier de l'existence est ce qu'ils nomment "progrès" ou "développement"... Abhorrant toute forme de "spiritualité", sinon à l'occasion certaines formes d'un bouddhisme complétement dénaturé, ces matérialistes quels qu'ils soient, ne savent rien et ne veulent d'ailleurs rien savoir de ces sujets d'ordre métaphysique, disons "transcendants" qui intéressent encore certains membres de ces sociétés "hésitantes"... entre Tradition et modernité... 


A (très) grands traits, dégageons deux tendances lourdes... Nous pourrions affirmer la présence d'un christianisme orthodoxe populaire "rédempteur" en Europe orientale face à un christianisme essentiellement moral des "puissants" plutôt bourgeois, protestant ou catholique romain en Europe occidentale.

Photographie : J-M Lemonnier, Sibiu-Transylvanie, Catedrala Sfanta Treime din Sibiu, 2009


jeudi 17 mars 2011

Géographie du sacré : le village roumain...

« Le village (Roumain) ne se situe pas dans une géographie purement matérielle et dans le réseau des déterminants  mécaniques de l’espace, comme la ville ; au regard de sa propre conscience, il se situe dans le monde et se prolonge dans le mythe. » Lucian Blaga, 1936