: Jean-Michel Lemonnier, bloc-notes: Augustin
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samedi 18 juillet 2020

Les nouveaux mythes fondateurs...

Avec les 7 mégots de Notre-Dame on se situe entre le mythe cosmogonique et le récit apocalyptique. C'est tellement incroyable et stupide qu'une telle explication a heurté peu d'intelligences. La mobilisation du chiffre 7 est en tout cas parfaite. Le mandat de Macron a ces deux dimensions adossées à deux piliers qui se confondent à la fois l'extermination et la (re-)fondation : la regeneratio totale du monde par le feu purificateur augustinien (entre la haine de soi, la narcissisme anhistorique et la repentance mémorielle) ou encore la table rase (économique et anthropologique) covidienne présentent à la fois les traits du récit de fondation du monde (son explication) et une dimension eschatologique. Le chaos et le nouveau cosmos du post-humain sans histoire, sans conscience autre que celle de lui-même en tant qu'épave circulatoire du ghetto marchand global qui ne doutera plus jamais de rien.
Il y avait déjà le feu partout sous Sarkozy et Hollande, sous Macron on a le "grand incendie cosmique". 

dimanche 28 juin 2020

Orthodoxie chrétienne et christianisme celtique

Ni Francs, ni Romains. La thèse des druides au contact du monachisme oriental (non réfutée) puis convertis et évangélisateurs (1) de l'espace celtique occidental est très intéressante. L'autoritarisme et le centralisme de Rome a, dans tous les cas, mis un terme à ce christianisme celtique orthodoxe (monachiste) ignorant jusqu'au 12ème siècle les influences mortifères que l'on connaît : Augustin, Grégoire 1er incompréhensiblement vénéré par l'Eglise orthodoxe....
 

Ci-dessous, une tentative de reconstruction :

http://www.eoc-coc.org/eglise-orthodoxe-celtique-accueil/accueil/?fbclid=IwAR2urMsPUQgtu6TnMO9raIu_BXIqQwqcaeWRWpFuRBHNP8ARDqckF2kDF_I

(1) Sinon vecteurs de cette translation de la plus pure Orthodoxie chrétienne via la monachisme de l'Orient vers l'Occident 

Intéressant mais rien sur les liens entre monachisme oriental, druides et christianisme celtique :
https://www.clio.fr/BIBLIOTHEQUE/les_chretientes_celtiques.asp

Sur saint Aristobulus :  http://oodegr.com/english/biographies/arxaioi/Aristobulus_Apostle.htm


 

jeudi 4 juin 2020

L'imposture théologique du concile d’Orange (529). Comment un concile régional a rejetté l'authentique Orthodoxie chrétienne et contribué au déclin spirituel de l'Eglise occidentale.

L'imposture théologique du concile d’Orange (529) présidé par Césaire d'Arles, ici  un commentaire affirmant l'orthodoxie de ce concile : Le concile de la grâce ou réflexions théologiques sur la concile d' Orange
Préférer Augustin et l'augustinisme aux moines de St Victor et aux moines lériniens, au grand saint Jean Cassien, disciple d'Evagre le Pontique (qui inspira les conférences de Jean Cassien), mais aussi à saint Honorat, St Vincent et St Hilaire d'Arles et alors que l'immense majorité de l'épiscopat de Gaule se rangeait du côté des Lériniens, serait donc une marque de la plus grande Orthodoxie.
C'est ce qui est écrit dans le texte par un catholique (ci-joint). Il faudrait donc préciser que signifie "orthodoxie" ds ce contexte. Par rapport au Concile de Trente ? Certainement, à la théologie latine obligatoirement.
Ce même concile s'opposait de fait à St Jean Chrysostome (Homélies sur l’Evangile de Matthieu) s'opposant lui-même en tout point à Augustin sur la prédestination.
Jean Cassien que les augustinistes-pseudo-orthodoxes (parlons clairement ici majoritairement des dits "Vieux-Croyants orthodoxes" en France) occultent systématiquement et catapulté "semi-pélagien" par des clercs profondément ignares alors que Cassien s'inscrivait parfaitement dans cette théologie qui a en son centre la déification de la nature de l'homme...Des "orthodoxes", par ailleurs, étrangement plus préoccupés de plaire à des catholiques traditionalistes plutôt que de retrouver  la communion des Eglises orthodoxes...


Et ça, si ce n'est pas un désaveu de la doctrine augustinienne, avant qu'elle ne naisse, à se demander si Augustin avait lu les pères antenicéens :
Saint Irénée de Lyon, un des plus proches de la tradition apostolique ; 

"Contre les Hérésies" (fin-IIe s.) :
Cette parole : Que de fois ai-je voulu rassembler tes enfants, et vous n'avez pas voulu (Mt.; 23, 37) illustrait bien l'antique loi de la liberté de l'homme. Car Dieu l'a fait libre, possédant, dès le commencement, sa propre faculté de décision, tout comme sa propre âme pour user du conseil de Dieu volontairement et sans être contraint par celui-ci. (...) Tous sont de même nature, capables de garder et de faire le bien, capables aussi de le rejeter et de ne pas le faire. (...) Dieu donne toujours à l'homme de quoi faire le bien (...) aussi celui-ci est-il jugé justement s'il ne le fait pas, puisqu'il pouvait le faire ; s'il le fait, il est justement récompensé, puisqu'il pouvait ne pas le faire. (IV ; 37, 1)
Et ce n'est pas seulement dans les actes, mais jusque dans la foi, que le Seigneur a sauvegardé la liberté de l'homme et la maîtrise qu'il a de soi-même : Qu'il te soit fait selon ta foi (Mt. ; 9, 29) dit-il, déclarant ainsi que la foi appartient en propre à l'homme par là même que celui-ci possède sa décision en propre. (IV; 37, 5)
Ce n'est pas l'art de Dieu qui est en défaut (...) mais celui qui ne se plie pas à cet art, celui-là est la cause de son propre inachèvement. (...) Ceux qui se sont séparés de la Lumière du Père et ont transgressé la loi de la liberté se sont séparés par leur faute, puisqu'ils avaient été faits libres et maîtres de leur décision. (IV ; 39, 3)"

Il manque à la liste Saint Ephrem le Syrien, St Grégoire de Nazianze,
et finalement St Grégoire de Nysse :  

"Celui qui a la libre disposition de toutes choses, poussant jusqu’à l’extrême son respect de l’homme, a permis que nous ayons aussi notre domaine propre, dont chacun serait seul maître : c’est la volonté, faculté qui ignore l’esclavage, qui est libre et fondée sur l’indépendance de notre raison.
Dieu pouvait, s’Il le voulait, amener de force les récalcitrants à accepter la bonne nouvelle ? Où serait alors le libre arbitre ?
Si la volonté n’intervient pas, la vertu disparaît nécessairement, entravée par l’inertie de la volonté. Chacun pourrait rétorquer : Rien ne dépend de notre volonté ; c’est une puissance supérieure qui conduit les volontés humaines à se ranger à la décision du souverain"

Il en reste...
La position d'Augustin sur l'élection s'oppose radicalement, c'est une évidence, à la DOCTRINE DE LA THEOSIS.
La France aurait-elle pu rester orthodoxe sans ces évêques et théologiens  ignares et manipulateurs ? La question est sans réponse. D'autant plus que l'ajout du Filioque (Récarède le Wisigoth/Toléde en 589 et surtout Charlemagne/Léon III) est un autre coup fatal porté des siècles plus tard à l'Orthodoxie occidentale.

Les orthodoxes n'ont pas connu cette polémique autour d'Augustin parce qu'ils ignorent fondamentalement Augustin contrairement à ce que racontent 2 ou 3 illuminés à la suite d'une poignée de théologiens malheureusement. Les thèses d'Augustin étaient fondamentalement ignorées jusqu'au 17e siècle dans le monde orthodoxe. L'uniatisme, le poison théologique infusé par l'Ecole de Kiev, la théologie russe d'importation du XVIIIe s. dans l'Eglise orthodoxe ont changé la donne.

Il est vrai qu'Augustin est cité au Ve concile œcuménique mais ça ne prouve rien. 3000 évêques "grecs" au total et 25, "latins", ont  participé aux 7 conciles. Peu d'entre eux ont laissé une œuvre théologique , alors qu'en est-il d'Augustin ?  Les évêques mentionnés sont en accord avec les concluions des conciles. Point. Quant à la qualification de père de l'Eglise, l'Eglise orthodoxe ne connaît pas le formalisme de l'Eglise dite catholique romaine (au passage l'Eglise orthodoxe  revendique légitimement cette catholicité et romanité) et cette liste de pères de l'Eglise n'est pas le fait de l'Eglise.  L'Eglise orthodoxe ne reconnaît, en outre, pas dans les catégories de saints  ou bienheureux le même formalisme que l'Eglise latine. Un Orthodoxe parlera souvent du bienheureux Augustin ou n'en parlera pas, considérant qu'il existe un nombre considérable de théologiens bien plus intéressants que celui-ci  dont l’œuvre brouillonne (Augutin ne se corrige pas, il jongle avec ses contradictions énormes) ne fait pas le poids face à celle d'un Jean Cassin, Grégoire le Théologien, Maxime le Confesseur et bien d'autres.
Séraphim Rose, malgré ses grandes qualités de théologien, dans sa fidélité à l'Ecole de Kiev tente une réhabilitation malheureuse d'Augustin en faisant la distinction entre pères selon la piété, catégorie à laquelle appartiendrait Augustin, et pères selon le dogme défendu. On saisit le malaise de ce théologien et sa difficulté à nous faire accepter Augustin comme relevant de la plus pure Orthodoxie.

lundi 21 mai 2018

Aristote, Averroès, st Thomas d'Aquin : une catastrophe pour le christianisme germano-latin occidental

La découverte d'Aristote par Thomas d'Aquin via Averroès : une catastrophe pour l'Occident chrétien.
Alors que des théologiens mystiques chrétiens occidentaux avaient réussi, bon gré mal gré, à contenir le poison augustinien, l'assaut contre la foi des Pères, autrement dit le christianisme authentique, a été donné par Thomas d'Aquin fasciné par Aristote (et son dieu païen). Funeste destin pour le christianisme latin que n'a heureusement pas connu le christianisme (grec) orthodoxe (malgré le succès, ici et là, des tentatives de latinisation dans le monde orthodoxe). C'eut été sinon la mort définitive du christianisme...

Extrait tronqué pour des raisons de droits d'auteur



dimanche 14 janvier 2018

Père François Brune - Contre Thomas d'Aquin et Augustin - Déificaton de l'homme - Orthodoxie - EFM - "Les Morts nous parlent"


Mystiques, théologie orthodoxe des Pères (pas cette fausse Orthodoxie uniatisante...), trépassés (le fameux Pierre Monnier) sont en accord.
 Il y a plus d'Orthodoxie et de connaissance de la théologie des Pères chez ce prêtre catholique romain, François Brune, que chez certain.e.s prétendu.e.s Orthodoxes.  A comparer avec ces horreurs et la théologie juridico-morale d'un Cléopa Ilie, moine pourtant très fameux en Roumanie :

vendredi 15 décembre 2017

Compte-rendu de lecture : « La grande métamorphose. Éléments pour une théo-anthropologie orthodoxe » de Jean Boboc

Le site orthodoxie.com  publie une recension dont je suis l'auteur : https://orthodoxie.com/compte-rendu-de-lecture-%e2%80%89la-grande-metamorphose-elements-theo-anthropologie-orthodoxe%e2%80%89-de-jean-boboc/
"La grande métamorphose. Éléments pour une théo-anthropologie orthodoxe" de Jean Boboc

Compte-rendu de lecture : « La grande métamorphose. Eléments pour une théo-anthropologie orthodoxe »

Informations sur l’ouvrage

Titre : La grande métamorphose. Eléments pour une théo-anthropologie orthodoxe 

Auteurs : Jean Boboc

Édition : Cerf Patrimoines

Année de parution : 2016
Informations complémentaires : 709 pages

 

 

Compte-rendu de lecture

Par Jean-Michel Lemonnier (Doctorant en géographie de l’université d’Angers, laboratoire ESO)

 

Jean Boboc est prêtre de la cathédrale orthodoxe des saints Archanges, Michel, Raphaël et Gabriel située à Paris et relevant du patriarcat orthodoxe roumain. Docteur en théologie orthodoxe, il est aussi docteur en médecine diplômé de la faculté de médecine de Paris. Enseignant en anthropologie patristique et bioéthique et doyen du Centre orthodoxe d’études et de recherche « Dumitru Stăniloae » fondée en 2008 sur décision du synode métropolitain de la Métropole Orthodoxe Roumaine d’Europe Occidentale et Méridionale (MOREOM), il est également professeur de bioéthique à l’Institut de Théologie Orthodoxe Saint-Serge de Paris. Le père Jean Boboc est l’un des rares traducteurs en langue française des écrits du fameux théologien orthodoxe roumain Dumitru Stăniloae à qui il est redevable autant sur le plan intellectuel que spirituel. On lui doit notamment la traduction d’« Ascétique et Mystique de l’Eglise Orthodoxe » paru aux Editions du Cerf en 2011. Son dernier ouvrage paru « Le transhumanisme décrypté. Métamorphose du bateau de Thésée » aux Editions Apopsix en 2017, livre militant, reflète ses préoccupations relatives à la manipulation du vivant, vis-à-vis d’une médecine au service de « l’homme augmenté » et son inquiétude face à une idéologie qui remet, clairement, en cause la condition humaine et ses limites. Son œuvre forme un tout cohérent et « La grande métamorphose. Eléments pour une théo-anthropologie orthodoxe », son précédent ouvrage qui nous intéresse ici pose les bases d’une pensée exigeante, complexe et subversive qui refuse toute concession à « l’air du temps ».

 

Le texte présenté est une version à peine modifiée de celui d’une thèse de doctorat soutenue en 2013 à l’Institut Saint-Serge intitulée « Homo absconditus et eschatologicus – éléments pour une théo-anthropologie orthodoxe, ternaire, apophatique et pneumatique ». On trouvera dans cette somme de plus de 700 pages, quelques remaniements essentiellement relatifs aux questions bioéthiques et sociétales, qui sont autant de mises à jour devant une actualité très riche dans ce domaine, mais aussi une bibliographie enrichie. Le propos ambitieux de Jean Boboc est sous-tendu par la question permanente et très vaste de la situation de l’homme dans le cosmos et du sens de la vie. Il est impossible de faire ressortir dans cette note toute la richesse intellectuelle et spirituelle de ce travail. Nous sommes donc condamnés ici à ne présenter que quelques traits saillants et significatifs de ce livre d’une profondeur telle qu’il pourrait bien se révéler tôt ou tard la pierre d’angle d’un nouveau « mode de penser », rendant caduque à terme l’opposition entre sciences profanes et théologie.

 

Le titre de l’ouvrage annonce clairement l’idée-force qui ressort de ce travail transdisciplinaire relevant à la fois de la théologie, de l’anthropologie, des sciences médicales, de l’écologie (humaine) et de la cosmologie sans confusion, sans séparation pour autant. Il s’agit là de reconstituer (ou constituer) à partir de la théologie des pères de l’Eglise, de l’héritage scripturaire de l’Ancien et du Nouveau Testament et des connaissances scientifiques les plus actuelles, une anthropologie orthodoxe en rupture avec l’anthropologie dualiste du christianisme occidental. Le postulat de Jean Boboc est très clair. Il existe une fracture anthropologique nette entre l’Orient et l’Occident chrétien, et celle-ci précède même, en termes d’importance, la fracture ecclésiologique. Qu’est-ce à dire ? Le christianisme occidental sous l’influence de la pensée grecque, notamment aristotélicienne, a occulté l’ontologie de l’esprit de l’homme. Pourtant, il existe bien une différence fondamentale entre âme et esprit prouvée par les écrits de l’Ancien et du Nouveau Testament. L’homme dans sa « totalité » est bien « corps-âme-esprit ». Si saint Paul est convoqué pour les besoins de la démonstration (et en priorité la première épître aux Thessaloniciens)[1], le corpus johannique, la Génèse et le Deutéronome viennent à propos. Les extraits les plus significatifs de la Bible parlant en faveur du tripartisme anthropologique sont donc soigneusement analysés. Au passage, l’auteur ne rechigne pas à égratigner les exégètes de la Traduction Œcuménique de la Bible (TOB) ni les commentateurs du texte de la Bible de Jérusalem niant le caractère fondamentalement ternaire de l’anthropologie qui ressort des évangiles synoptiques.  Mais ce sont aussi les écrits des pères, Grégoire de Nysse, saint Irénée, Maxime le Confesseur, Grégoire Palamas, saint Ephrem ou encore la littérature philocalique, qui permettent à Jean Boboc d’étayer sa thèse. Ce dernier réunit donc un faisceau de preuves lui permettant de démontrer la validité de cette anthropologie tripartite.

 

L’utilisation du terme « anthropologie » dans ce contexte pose, sans doute, problème si l’on se contente de sa définition traditionnelle et de ses objectifs en tant que discipline au croisement des sciences humaines et des sciences de la nature. Il faut donc accepter dès le début de l’exposé, que cette anthropologie désigne une doctrine révélée avec en son centre ce principe « Dieu a fait l’homme à son image » et donc reconnaître ce parti pris métaphysique. Le père Boboc définit alors son anthropologie révélée ou théo-anthropologie comme « une connaissance du sens de l’homme en dépendance directe du Verbe incarné » (p. 585).  « Contre le dualisme anthropologique a-pneumatique, tenu par nous comme le fauteur de tous les maux philosophiques, politiques et théologiques, nous avons proposé l’alternative d’une théo-anthropologie tripartite, pneumatique et apophatique, réorientée sur l’homme mais à l’image de son archétype incarné, constitué d’un corps, d’une âme et d’un esprit, c’est-à-dire d’un corps psychique et d’un πνεῦμα, tout entier appelé à la déification dans l’intégralité de la personne pneumatisée » (p. 587).

 

La structure ternaire de l’ouvrage : « Sous le signe de l’incomplétude », « Sous le signe de la métamorphose », « La révolution anthropologique.Incarnation-Résurrection », loin de correspondre à un plan dialectique d’inspiration hégélienne reflète, bien  plutôt, l’utilisation de la méthode apophatique fixée (et non figée) à travers trois grands moments d’une démarche ontologique permettant d’aboutir  à une forme supérieure de connaissance et inscrivant dans le discours argumentatif l’incomplétude qui fait appel à la foi.

 

Le premier de ces moments est un état des lieux des anthropologies premières. Il s’agit là de passer en revue -sans viser à l’exhaustivité- les grandes traditions philosophiques de l’antiquité des suméro-babyloniens aux néo-platoniciens et ceci n’a pas d’autre objectif que de « rappeler la toute prédominance de l’anthropologie conçue de manière dualiste, le caractère impersonnel de l’âme une fois parvenue à sa perfection, l’absence de téléologie du corps et la thèse contestée de la lente progression de la doctrine de la spiritualisation du pneuma » (p. 143).

Reprenant à son compte (mais hors contexte) la citation de Cioran « si la philosophie n’avait pas progressé depuis les présocratiques, il n’y aurait aucune raison de se plaindre »[2], Jean Boboc condamne la philosophie grecque dans son ensemble du fait de son anthropologie matérialiste a-pneumatique tout en concédant à certains représentants des écoles stoïciennes du monde hellénistique un « monisme spiritualiste où le monde est pénétré de logos et d’esprit » (p.145). L’auteur récapitule ensuite les « moments significatifs » qui ont produit ce concept d’autonomie de la « nature pure » et cette opposition entre nature et surnature irrecevables dans l’orthodoxie chrétienne, de la théologie de la grâce chez saint Augustin aux Lumières en passant par saint Thomas d’Aquin.

 

Le deuxième moment de la démonstration pose le dilemme anthropologique qui s’offre à l’homme : « naître à l’esprit » ou « cultiver le vieil homme ». C’est là l’enseignement du Christ au Pharisien Nicodème appelant ce dernier à la métamorphose, à mourir à l’ancienne vie pour naître de nouveau. Nous trouvons dans ce moment, la justification de la démarche apophatique « De même il y a une théologie apophatique menant vers les plus profonds mystères divins, de même doit exister aussi une anthropologie apophatique conduisant au mystère profond de l’homme » (p. 187). Si la logique analytique « classique » est mise de côté, c’est pour mieux laisser la place à la logique apophatique permettant d’approcher le mystère de l’homo absconditus, « l’image divine, imprimée et vivante dans la créature » (p.190) qui échappe continuellement aux concepts bornés, à une réalité ontologique insaisissable et qui est appelé à se changer, se métamorphoser par pneumatisation en homo eschatologicus. Ni science, ni philosophie, l’anthropologie révélée orthodoxe est bien une connaissance d’ordre apophatique. 

 

Enfin le troisième moment est celui où Jean Boboc tire les conséquences de « l’unique mutation anthropologique historique », celle de l’Incarnation-Résurrection, véritable essence du christianisme, entraînant la « double mutation ontologique » « Dieu s’est fait homme pour que l’homme devienne Dieu à son tour » centrale dans toute la littérature patristique de saint Irénée, saint Athanase ou encore, parmi d’autres, Grégoire de Nysse et largement oubliée au sein du christianisme occidental, autrement dit catholique romain et protestant. En effet, sous l’influence d’Anselme de Cantorbery, l’Occident chrétien allait très tôt ne retenir que la première proposition (« Pourquoi Dieu s'est fait homme ? ») condamnant ainsi le catholicisme romain et sa « branche réformée » a une sorte d’hémiplégie spirituelle et évacuant la divinisation, déification (theosis) de l’homme tout entier en ses trois dimensions.

 

L’auteur met donc en accusation les systèmes anthropologico-philosophiques qui ont, selon lui, totalement échoué à répondre à la question « qui est l’homme ? ». La dimension pamphlétaire de ce livre-thèse est, par ailleurs, clairement assumée. On relèvera quelques titres de chapitres et formules qui témoignent du caractère polémique de l’ouvrage : « L’échec des systèmes anthropologico-philosophiques », « Le naufrage anthropologique » « leur anthropocentrisme réducteur […] appelé aussi à tort humanisme » (p. 167), « L’illusion de l’anthropocentrisme » (p. 195), « l’influence néfaste de la théologie juridico-morale de l’Occident » (p. 468), « les doctrines et théories toujours présentées comme des vérités et non comme des hypothèses […] conduisent à un cul de sac anthropologique » (p. 620), ou encore  « Le temps du suicide anthropologique » (p.629) pour désigner notre époque, etc.

 

Or donc, Jean Boboc reprend là une position assez commune chez les théologiens orthodoxes. Le dualisme du christianisme occidental -héritier de l’a-pneumatisme des philosophies pré-chrétiennes- dont les meilleurs représentants sont certainement Augustin et Thomas d’Aquin, a une lourde responsabilité, notamment, dans la construction du dualisme cartésien, dans celui des Lumières séparant l’homme de son créateur et finalement dans l’émergence des philosophies matérialistes athées du XIXe siècle, du marxisme au réductionnisme psychanalytique assimilant l’esprit à la psyché. D’Aristote aux Lumières en passant par les intellectuels de la Renaissance, de saint Augustin aux penseurs de la mort de Dieu puis de celle de l’homme (transhumanisme), il y a donc un héritage macabre latent : la négation de l’esprit par sa confusion avec l’âme, jusqu’à dans la disparition de cette dernière…

 

La théo-anthropologie interpelle, bien sûr, des pans entiers de la recherche médicale en particulier la bioéthique.  Tout ce que le père Boboc ose nommer « dérives transgressives » (p. 636) de la recherche scientifique émane directement de cette « anthropologie naturaliste et dualiste apneumatique » (Idem). On pourrait penser qu’il s’agit là d’une réactualisation d’un antique débat entre science et religion ou encore d’une volonté de nuire à la marche du « progrès ». Il n’en est rien. S’adossant à Maxime le Confesseur notamment, Jean Boboc défend l’animation immédiate de l’être humain et la coexistence de l’âme et du corps (p. 337) et voit dans les connaissances scientifiques actuelles qui parlent en faveur de l’individualisation de l’embryon dès sa conception, l’assurance de la validité de sa thèse. En outre, la saisie du zygote humain par l’Esprit balaierait définitivement les positions pythagorico-platoniciennes sur la préexistence des âmes, totalement obsolètes, et trancherait définitivement en faveur de l’animation immédiate, et rendrait par incidence intouchables l’embryon humain. Cependant, le père Boboc ne s’oppose en aucun cas à la recherche scientifique en génétique et embryologie tant qu’elle ne menace pas l’être créé. En cela, la méthode actuellement répandue de fécondation in vitro, par exemple, est à proscrire car elle produit des embryons surnuméraires. Pour autant, à titre d’exemple, les travaux récents de chercheurs (Yamanaka, Gurdon), concernant la reprogrammation possible de cellules adultes en cellules pluripotentes (p. 641) ne ferment pas la voie à de nouveaux progrès souhaitables -du point de vue de l’anthropologie orthodoxe révélée- dans le domaine médical car ceux-ci ne transgressent en rien la condition de l’homme créé à l’image de Dieu.

 

Si ces « éléments pour une théo-anthropologie orthodoxe » sont une dénonciation des « cultures de mort » réduisant l’homme à son corps à l’avoir et au paraître (« somatocratie ») et une mise en garde face aux fausses promesses d’éternité des savants fous du transhumanisme, ils sont aussi et surtout réaffirmation de la promesse et de l’espoir chrétiens de la « grande métamorphose » de l’homme, de sa déification par la pneumatisation de tout son être.

 





[1] « Que le Dieu de la paix lui-même vous sanctifie tout entiers ; que votre esprit, votre âme et votre corps, soient tout entiers gardés sans reproche pour la venue de notre Seigneur Jésus Christ » (1 Th 5, 23).

[2] Cioran, E. (1949). Précis de décomposition, Idées NRF, Gallimard : Paris, p. 71

samedi 23 septembre 2017

Influence de la théologie augustinienne dans l'orthodoxie chrétienne en Transylvanie (exemple des fresques)

Extrait du livre de Jean Boboc, "La grande métamorphose. Éléments pour une théo-anthropologie orthodoxe", 2016. Livre majeur de et pour notre époque pour des raisons sur lesquelles il faudrait très longuement revenir, peut-être ici, un jour...Signalons que ce livre est absolument exceptionnel, novateur, bien loin des contorsions philosophiques-spectaculaires et des agitations littéraires bourgeoises stériles de notre époque...
Or donc. Dans ce passage, le père Jean Boboc, prêtre de la Métropole orthodoxe roumaine d'Europe occidentale et méridionale (MOREOM, diocèse du patriarcat roumain), docteur en médecine et en théologie rappelle cette contamination de l’Église orthodoxe par cette théologie catholique romaine (Augustin, Thomas d'Aquin, scolastique) et sa morale de refoulés à travers l'art sacré (qui ne l'est plus vraiment puisque dans ce cas parfaitement opposé à la théologie orthodoxe d'inspiration patristique, seule en mesure de produire un art sacré...).


Crédit photo. / JM Lemonnier

Fresque d'une entrée (porche) de cimetière "ORTHODOXE" en Transylvanie (village Carpates méridionales). Le thème peint ne se réfère, en aucun cas à la théologie orthodoxe, finalement celles des Pères dits "orientaux" (des théologiens typiquement orthodoxes ont vécu en "Occident" : saint Irénée, Hilaire de Poitiers...). On est très loin du véritable art sacré, celui des icônes, fresques d'églises et monastères authentiquement orthodoxes... 
Aceasta fresca la intrarea într-un cimitir din România (Carpați) marturiseste despre contaminarea crestinismului ortodox român prin teologia romano-catolica si a moralitatii sale perverse. (JML, 2017). 

La théologie aristotelo-augustino-thomiste a largement -et ce durant des siècles- infesté l'Eglise orthodoxe roumaine. Présence de l'Empire austro-hongrois, monarchie allemande "roumaine" du XIXe s., "latinité" et politique de déshéllénisation de l'Eglise orthodoxe roumaine sous A. I. Cuza sont autant de facteurs ayant permis l'introduction des erreurs doctrinales d'un st Augustin ou d'un Thomas d'Aquin.
En ce qui concerne la période récente, c'est par transfert de milliers de clercs (prêtres, évêques) et de fidèles issus des Églises uniates greco-catholiques (interdites durant la période communiste) vers l’Église orthodoxe roumaine qu'une contamination massive s'est produite...

vendredi 27 mai 2016

Entretien avec le père François Brune "l'orthodoxe"

Il faut passer ce générique particulièrement énervant et abrutissant avant d'accéder au début de l'entretien vers 30 s.

Entretien avec le père François Brune. 
Catholique iconoclaste ? Plutôt catholique iconodoule... Il a accompli sa mission de soldat du Christ à la marge de l’Église catholique romaine (ECR). Critique de la théologie de saint Thomas d'Aquin soit celle de l'ECR (d'ailleurs reconnue comme fausse par son auteur), par incidence de celle de saint Augustin, lien entre les expériences des mystiques chrétiens occidentaux, les expériences de mort provisoire et l'orthodoxie chrétienne, la théologie de l'icône chez les orthodoxes...
Le Père François Brune a parfaitement compris la rupture entre Orient et Occident chrétien qui porte évidemment sur la question de l'infaillibilité du pape ou encore, évidemment, l'ajout du Filioque par les catholiques (au sens de ceux qui se rattachent à l’Église catholique romaine, on doit en outre toujours préciser que les orthodoxes confessent leur croyance en la sainte Église catholique et apostolique, il faudrait revenir sur ce point) qui a des conséquences théologiques graves. Saint Augustin (IVe s.) et à sa suite saint Thomas d'Aquin (XIIIe s.) sont les principaux penseurs à avoir dessiné la voie funeste sur laquelle les chrétiens occidentaux se sont engagés depuis des siècles. Le Filioque mais aussi la place limitée qu'occupe le Saint-Esprit (la Vierge Marie l'a quasiment remplacé) chez les catholiques romains sont le fait d'Augustin. C'est à lui que l'on doit également une théologie de la Grâce, source d'un profond désaccord entre catholiques romains et orthodoxes. Augustin  a dans sa pensée introduit la notion de "nature pure" , même si l'expression n'est pas utilisée telle quelle. Il distingue deux ordres, celui de la nature et celui de la grâce et montre par là la profonde contamination de son œuvre par le dualisme platonicien. La grâce se surajoute à la nature, la première rachetant la seconde. Cette positon est intenable pour les orthodoxes qui ne font pas de différences entre nature et surnature et n'ont guère besoin de faire appel à l'idée de "nature pure". Nous donnons ici quelques éléments d'explications que nous serons à amener à développer dans une future publication...
Or donc, le point de vue orthodoxe dit contre saint Augustin que nous subissons les conséquences du péché originel mais que nous n'en sommes pas responsables. Par contre, nous sommes bien responsables de nos fautes présentes. En outre, pour les chrétiens orthodoxes, Adam n'est pas un être parfait puisqu'il commet l'erreur. Or, les catholiques sous l'influence d'Augustin l'envisagent donc comme un être de perfection et considèrent que la liberté absolue a été détruite par le péché originel. Nous pouvons affirmer que c'est  la doctrine la Grâce de saint Augustin (piètre théologien puisque...philosophe), qui engendrera la désastreuse théologie de saint Thomas d'Aquin mais aussi des siècles plus tard la philosophie des Lumières. En somme, un chrétien qui dénoncerait l'idéologie des Lumières mère de la catastrophe anthropologique actuelle (engendrée par le freudo-nietzschéo- marxisme)  sans dénoncer l'augustinisme et le thomisme, comme c'est souvent le cas, n'a pas fait le début même d'un travail critique...

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