"J'appelle bourgeois quiconque pense bassement..." Gustave Flaubert
Les opérations porno-punk du genre de celles des « pussy riot »
financées par des officines « occidentales » spécialisées dans des
tentatives de déstabilisation de certains régimes « par le spectacle ».
(voir notre article notamment, http://www.agoravox.fr/tribune-libre/article/de-l-ideologie-dominante-de-la-121969
ne sont pas là pour « choquer le bourgeois ». Nous sommes dans ce
contexte en Russie, dans un pays où le christianisme orthodoxe est
encore très populaire comme dans de nombreux pays nommés autrefois «
démocraties populaires » : Roumanie, Bulgarie, Serbie…
En effet, le bourgeois russe occidentalisé soutient généralement ce
genre de manipulations grossières, justement parce qu’il a intégré tous
les codes de ce nouvel ordre « vulgaire » : pornographie, chaînes
cablées/satellitaires, sport-spectacle, chansons de variétés
anglo-saxonnes (Lady Gaga, nouvelles ringardes à la Madonna, etc.), art
contemporain (ce nouvel académisme), soumission pleine et entière au «
profane » et détestation du « sacré ».
Considérer que les « performances » de ces « Pussy riot » sont là
pour « indigner le bourgeois », c’est donc ne rien entendre à la
situation de l’Eglise orthodoxe russe et n’avoir, de fait, aucune
connaissance de l’origine sociale des chrétiens pratiquants, pour la
plupart issus du « petit peuple » russe. Non, elles sont favorisées pour
imposer un « nouvel ordre moral ». Or donc, contrairement à ce que certains ânonnent, le bourgeois
dominant « mondialisé » fait systématiquement l’apologie de toutes les
transgressions ou du si peu qu’il reste à transgresser dans nos «
sociétés occidentales ».
En France, ce sont Charlie Hebdo, Canal + (qui se voulait à
l’origine un « Hara Kiri » version télévisée…), les « animateurs radios
jeunes » et leurs 70 mots de vocabulaire, les jeux télévisés, les
rappeurs takfiro-capitalistes (dont un Besancenot et un des des fils
Sarkozy sont visiblement « fans ») ou les « écrivains » à la Virginie
Despentes par exemple, qui sont en charge de maintenir « l’ordre
transgressif » et la bonne humeur, de « verrouiller le système » pour
que n’émergent plus de réels subversifs qui donneraient un peu à
penser...
D’ailleurs, toute personne invitée sur un de ces plateaux télévisés
infâmes -où se côtoient dans le même temps le politique, l’écrivain, le
comique, la star du porno- et qu’on soupçonne de faire preuve d’un peu
d’intelligence (même de loin) sera systématiquement raillée par
l’imbécile de service.
La gaudriole, le « blasphème » semblent, d’ailleurs, de plus en plus
lasser un certain public, toutes classes confondues… la « subversion »
étant partout, celle-ci n’émeut plus une bonne part d’Occidentaux, parce
que justement parfaitement conditionnés, accoutumés. De la lutte
anti-cléricale de retard des gauchistes de Charlie Hebdo aux pièces
scatophiles « blasphématoires » de Castellucci, rien de bien neuf. La
même rengaine depuis plus de 100 ans en France, a fortiori depuis 40
ans. Servilité totale, sans retenue de ces « amuseurs » face au Système.
Sans doute, faudrait-il peut-être expliquer à ces personnes, s’ils
leur arrivent de réfléchir et d’être en mesure de se remettre en cause
(mais nous croyons faire preuve de trop d’optimisme) que les églises
aujourd’hui en France sont vides, qu’une bonne part des citoyens
français de moins de 40 ans n’ont jamais croisé un prêtre de leur vie et
n’ont même pas idée de ce qu’est une religion organisée...
Il est un fait : les « libéraux-libertaires » ont gagné le combat
culturel depuis environ 40 années. Si à l’origine, cet élan libertaire a
pu apporter un peu de fraîcheur, d’insolence, d’irrévérence dans une
société encore très marquée par un certain ordre conservateur,
politiquement aussi bien défendu par un De Gaulle que par le Parti
Communiste Français (i.e. le bipartisme issu du Conseil National de la
Résistance), force est de constater, quatre décennies plus tard, que
cette « libération des mœurs » n’était en réalité que le cache-sexe, le
cheval de Troie d’un néo-capitalisme basé sur le désir, la séduction :
un néo-fascisme, soit la collusion du libéral et du libertaire… Michel
Clouscard l’avait compris dès 1968.
Il ne suffit plus de vouloir « bouffer du curé » pour prétendre
bousculer l’ordre établi. Le travail est fait depuis des décennies. Les
caricaturistes ou « humoristes » à la Charlie ou Canal Plus ne sont,
plus aujourd’hui, que des relais d’une idéologie dominante, des valets
aux ordres d’un pouvoir global qui demande une soumission, par la «
séduction » (la publicité en est un des moyens) à ce néo-totalitarisme
dont le « spectacle » (sens restreint) en est une des composantes. Un
totalitarisme d’un genre nouveau qui impose la consommation
transgressive (i-phone, écrans plats, pornographie, sport-télévisé, jeux
vidéo, etc.), l’obligation d’hilarité devant des « comiques » à
l’humour convenu, voire la fréquentation des « boîtes à partouzes » ou
des « apéros Facebook »…
Ces « individus atomisés » –il n’est plus question de communauté
nationale en France- que les médias dominants nous présentent comme «
anticonformistes » sont pourtant doués d’un instinct grégaire fort
dévéloppé. Apologistes de tout ce qu’ils prennent pour de la
transgression. Qu’ils soient amateurs de pornographie gonzo ou qu’ils se
passionnent pour la chanson française néo-réaliste des rebelles des
beaux quartiers (Saez, Cali…), ils ne sont en réalité que de purs
conformistes, des névrosés, soumis à ce « capitalisme de la séduction »,
autoritaire, totalitaire avec son obligation de jouissance (voir, par
exemple, les récurrents articles sur les « clitoridiennes » dans la «
presse » féminine-féministe).
Revenons sur un événement s’étant déroulé lors de l’une des
représentations de la pièce de Castellucci « Sur le concept du visage de
Dieu », très symptomatique de l’expression souvent autoritaire de ce «
régime libéral-libertaire »… Nous avons alors vu des chrétiens
catholiques romains être évacués par des policiers… « L’ordre libertaire
» s’est révèlé « sécuritaire », botté et casqué.
C’est sous les applaudissements d’un public bourgeois (politiquement
indifférencié/indifférenciable) que les quelques perturbateurs ont été
sortis du théâtre pour que cette nouvelle aristocratie d’argent
post-soixanthuitarde puisse continuer à déféquer sans être dérangée par
ces « furieux réactionnaires », empêchant le spectacle
libéral-libertaire de tourner en rond.
Le corollaire à cette mise en scène globale, c’est évidemment la «
mauvaise éducation » qui devient une norme ; c’est le « citoyen » (terme
aujourd’hui cuisiné à toutes les sauces) qui se sent obligé de se
comporter « comme un con » (disparition des « civilités » élémentaires,
langage relâché, cynisme, vulgarité et inculture revendiquées) pour
coller à un air du temps et ne pas passer pour un « faible », un «
soumis », c’est à dire simplement un être possédant des « qualités
morales » (attention fascisme !!!), aux yeux du troupeau bêlant : « il
est interdit d’interdire »…
Du mépris des enfants mal-élevés de la bourgeoisie dominante à
l’égard des petites gens n’appartenant pas à leur caste, à la violence
(considérée comme « légitime » par les trotsko-libéraux) des
sous-prolétaires (aspirants-bourgeois) des « cités », c’est l’injonction
de manquement au minimum de règles qui régissent le fonctionnement «
normal » (attention contestation du relativisme !!!) d’une société qui
est valorisée, donnée en exemple à des individus aujourd’hui isolés,
obligés de s’adapter à ces codes de conduite sous peine d’être
marginalisés socialement, voire professionnellement… « Tu seras un con,
mon fils ! »
…Une absence de valeurs (permettant de « faire société ») ou plutôt
la promotion de « non-valeurs » cautionnée et favorisée par les «
libéraux-libertaires » (et leurs émules), pseudo-révolutionnaires alliés
objectifs de la droite économique/patronale, dont l'unique but en 68
(le « mai ouvrier » n’avait rien à voir avec cela) était de « normaliser
la baise », de « jouir sans entraves »…
…la bite à gauche, le portefeuille bien à droite... une norme absolue, indépassable (?) désormais…
Au passage rappelons, que ce sont, d’ailleurs, ces
ex-anarcho-trotsko-maoistes devenus néo-cons' qui soutiennent
aujourd’hui, les chrétiens évangéliques américains dans leurs « guerres
contre la Terreur »…tout comme ils furent des acteurs décisifs dans la
décision du gouvernement français d’intervenir militairement en Serbie
en 1999 …
De nos jours, une simple critique de ces états de fait tels
qu’exposés dans cet article vaudra à son auteur une généreuse volée de
bois vert… Lecteurs, que l’insulte soit généreuse !
Le Roumain Constantin Toiu, décédé récemment, écrivait dans son
excellent roman « l’exclu » que l’Homme est doté d’une colonne
vertébrale qui lui permet de rester droit, debout mais aussi…fier…et
seul s’il le faut, quand tous les autres se sont soumis à la dictature
du « on », à la « pensée dominante » (ou pensée unique), forcément molle
et paresseuse… Mais à quel prix l’ « être-là », i.e. chacun de nous
(pour reprendre Heidegger) peut-il conserver son authenticité par
rapport au groupe, s’extraire de cette tyrannie sans tyran, de ce « on
», c’est à dire cette collectivité indistincte ?
par Jean-Michel Lemonnier