: Jean-Michel Lemonnier, bloc-notes: néo-capitalisme
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vendredi 19 septembre 2014

Refuser de continuer à s'identifier à la valeur d'usage du néo-capitalisme et répression libérale-libertaire...


Refuser de (ou ne plus pouvoir) continuer à s'identifier à la valeur d'usage du néo-capitalisme (ça prend des formes très variées), de respecter les régles de l'idéologie freudo-marxiste  c'est s'exposer à la répression du pouvoir des libéraux-libertaires et de fait à la véritable marginalisation (pas celle du faux-rebelle de chez Canal + ou de l'invité du vendredi soir chez Ruquier qui est le modèle du parfait...intégré, plébiscité par les classes moyennes et les petits-bourgeois) : dépression, mort sociale, etc. 

Le bourgeois ou l'individu issu de la classe moyenne d'argent (sociotype très pertinent qui dit autant la négation de la lutte des classes  que la dépolitisation massive), libertaire et débonnaire, jette alors le masque et se fait "sévère" (cela prend donc aussi, par incidence, des formes très variées). Il exige plus de répression envers le producteur pour pouvoir continuer à consommer au même niveau, se met au "vote radical" parce que son mode de vie est contesté (crise économique) ou plus prosaïquement encore passe alors un coup de fil à son avocat, fait jouer "ses relations" ou signe une pétition contre tel un ou telle autre... parce qu'on lui a piqué sa place de parking, qu'on fait du camping dans son jardin, parce qu'il n'est pas satisfait de son achat (voyage, restau, etc.) ou pour défendre le fiston contre "l'autorité" (policiers, enseignants, etc.). 

Le libertaire voit resurgir le fantasme enfantin de l'interdit et de la castration, il se fait alors sécuritaire...

Le bourgeois de la coolitude libertine libérale (1) (malgré ses disques de Gainsbourg, de Led Zepelin ou de Cali-Bénabar...) "découvre" alors que tout n'appartient pas à tout le monde malgré ses bavassages sur le "permissif", le "cool", "l'indifférencié" même s'il a été gauchiste dans sa jeunesse et qu'il fume encore son pétard de temps en temps, même après 50 ans, sur sa terrasse d'une vieille maison paysanne dont le prix a été multiplié parfois par 100 depuis son achat volée aux familles paysannes pauvres  achetée pour 3 fois rien donc, grâce à  la déportation des masses rurales l'exode rural post-1945 (qui débute dès la fin du XVIIIe s. dans certaines régions françaises)...

Le "sans-frontiérisme", le "spontanéisme", le "sans identité fixe" (pour les plus radicaux du style Butler, Preciado et cie), le "flexibilisme-relativisme" de ces belles âmes libérales s'arrêtent donc à la clôture de leur(s) propriété(s)...

En finir avec le capitalisme, c'est nécéssairement, aujourd'hui, après Mai 68 en finir avec le freudo-marxisme. Seule, une contestation totale de ce "fait social total" qu'est le capitalisme, i.e. autant un mode de gestion de la propriété/production qu'un imaginaire (donc des valeurs et un mode de vie) peut mettre les hommes et femmes en révolte contre le système actuel, sur la voie du véritable socialisme : le socialisme décent, autrement dit un socialisme défendant les valeurs du don/contre-don, du "bon sens" (café du commerce ! retour de la bête immonde ! jounalisme ! s'indigneront les universitaires de gauche), etc.


Et c'est sur ce point que l'on se rend compte du niveau dramatique de culture politique de certains intellectuels dits de gauche et dits constestataires et par incidence de celui de tous les militants porte-valises quand ils invoquent la bourgeoisie en tant que catégorie figée. Et on comprend, de même, pourquoi la pseudo-critique du néo-capitalisme portée par l'hédoniste dionysiaque Michel Onfray obtient autant de succès auprès des classes moyennes et des petits-bourgeois radicaux de gauche. Ignorer cette mutation de la bourgeoisie depuis quelques décennies, c'est donc ignorer la mutation fulgurante du capitalisme depuis 70 ans, (la bourgeoisie traditionnelle catholique de type "gaulliste-bonapartiste" ou maurassienne n'existe donc plus), par suite tout positionnement anti-capitaliste ignorant ces paramètres n'est qu'un palliatif discursif encourageant le maintien du système politique et économique en l'état.




Crédit photo. : http://www.ifcfilms.com/films/something-in-the-air

(1) Le même genre d'ostrogoths toujours prêts, aussi parfois, à donner des leçons au gosse de prolo, au travailleur pauvre sur la valeur du travail, de l'argent, etc. ça dit aussi toute la violence symbolique, psychologique (la véritable et la plus répandue des violences c'est celle-ci) diffusée par certains des plus beaux specimens qui défendent ce "système"...

samedi 14 septembre 2013

Pier Paolo Pasolini


Pasolini, marxiste critique à l'égard du "développement", "chrétien primitif" (et pagano-chrétien), contre l'hédonisme, le permissif, le consumérisme qui relèvent du conformisme petit-bourgeois (encore aujourd'hui, le succès de Michel Onfray en France dans certains milieux illustre bien ce constat), contre cette extrême-gauche des années 60 et la stupidité de ses thèses ("politique de la table rase"), mais aussi rejet de l’Église instituée et de ses clercs qui préférèrent s'assoir à la table des "dominants", de la droite capitaliste-fascisante italienne. Une Église progressivement éjectée du jeu politique puisque devenue "inutile". Pasolini met en avant l'idée que l’Église catholique romaine ne joue plus aucun rôle dans l’oppression des peuples occidentaux (et dans celle de la femme, de fait) et que la plus terrible des aliénations est celle de la soumission au "spectaculaire marchand". En outre, l’Église doit donc en finir avec ses trahisons à l'égard du message du Christ et de son peuple et devenir  le fer de lance des révoltes populaires à venir.

Pasolini écrira dans une série d'articles que l'on retrouve dans "Écrits corsaires" (cf. infra) que la société de consommation, "l’hédonisme de masse" (c'est son expression) et ce néo-capitalisme qui émergent dans les années 60 et 70 ont réussi à créer un type anthropologique d'un genre totalement nouveau et la "réduction [des Italiens et de tous les 'occidentaux'] à un modèle unique", "Frustration ou carrément désir névrotique sont désormais des états d'âme collectifs". 

Cependant, derrière l'expression "société de consommation", Pasolini ne semble guère vouloir distinguer la consommation qui permit aux plus modestes d’accéder à des produits d'équipements qui ont pu améliorer leur vie, de cette "consommation ludique, marginale  et libidinale". Là, il faut lire Michel Clouscard qui conteste cette appellation générique car selon lui, il n'a jamais existé une telle société dans le monde occidental. Si tel était le cas nous serions dans une société d'abondance (société communiste aboutie donc). 

 Des imbéciles ont voulu voir en Pasolini un "rouge-brun". Incompréhension face à la complexité du personnage et de son discours de la part du "vulgaire" et des idéologues qu'ils soient de droite ou de gauche (extrêmes inclus) à cause de la binarité de leur mode de raisonner, de leur "hémiplégie morale".


Pasolini  est assassiné à proximité de la plage d'Ostie (Rome), dans la nuit du 1er au 2 novembre 1975.

Un an avant sa mort, dans un éditorial du "Corriere della sera"  du 14 novembre 1974, Pasolini menaçait, de fait, en affirmant  : "Je sais les noms des responsables de ce que l'on appelle golpe (qui est en réalité une série de golpes (...)). Je sais les noms qui composent le 'sommet' qui a manœuvré aussi bien les vieux fascistes créateurs de golpes que les néofascistes, auteurs matériels des premiers massacres et que, enfin, les inconnus responsables des massacres les plus récents..." Dans son roman "petrole", il souhaitait dénoncer la violence et les crimes d’État, des industriels et du pouvoir économique italiens.

"On l'a exécuté a affirmé il y a quelques années Pino son assassin présumé. Ils étaient cinq. Ils lui criaient : "Sale pédé, sale communiste ! " et ils le tabassaient dur. Moi, ils m'avaient immobilisé. Je ne l'ai même pas touché, Pasolini, j'ai même essayé de le défendre..." Pour Pino, il y a cinq agresseurs : " les frères Borsellino, deux Siciliens fascistes et dealers""ils exécutaient une commande. Ils voulaient lui donner une leçon et ils se sont laissés aller. C'est que Pasolini cassait les pieds à quelqu'un" La Loge P2 ?

(voir ici pour les révélations de Pino)
                                                         

Je suis une force du Passé.
À la tradition seule va mon amour
Je viens des ruines, des églises,
des rétables, des bourgs
abandonnés sur les Appennins ou les Préalpes,
là où ont vécu mes frères.
J'erre sur la Tuscolane comme un fou,
sur l'Appienne comme un chien sans maître.
Ou je regarde les crépuscules, les matins
sur Rome, la Ciociaria, l'univers,
tels les premiers actes de l'Après-Histoire
auxquels j'assiste, par privilège d'état-civil,
du bord extrême d'un âge
enseveli. Monstrueux est l'homme né
des entrailles d'une femme morte.
Et moi, foetus adulte, plus moderne
que tous les modernes, je rôde
en quête de frères qui ne sont plus 

Poesia in forma di rosa, Garzanti, Milano 1964 
                                                                                  (1922-1975)


   
"L'Italie est un pays qui devient de plus en plus stupide et ignorant. On y cultive des rhétoriques toujours de plus en plus insupportables. Il n'y a pas de pire conformisme que celui de gauche, surtout, naturellement, quand c'est adopté par la droite."

Sur 68, "révolte" de sinistres enfants de bourgeois, de narcisses nietzcheo-debordiens et autres vaniteux jouisseurs marcusiens dont l'unique but a été de prendre le pouvoir culturel puis politique. Une bourgeoisie en a chassé une autre :
"J'ai passé ma vie à haïr les vieux bourgeois moralistes, il est donc normal que je doive haïr leurs enfants, aussi… La bourgeoisie met les barricades contre elle-même, les enfants à papa se révoltent contre leurs papas. La moitié des étudiants ne fait plus la Révolution mais la guerre civile. Ils sont des bourgeois tout comme leurs parents, ils ont un sens légalitaire de la vie, ils sont profondément conformistes. Pour nous, nés avec l'idée de la Révolution, il serait digne de rester fidèles à cet idéal."

Sur le fascisme, l’antifascisme et la "société de consommation"
(article Acculturation et acculturation, 9 décembre 1973)  :
"Une bonne partie de l'antifascisme d'aujourd'hui, ou du moins ce qu'on appelle antifascisme, est soit naïf et stupide soit prétextuel et de mauvaise foi. En effet elle combat, ou fait semblant de combattre, un phénomène mort et enterré, archéologique qui ne peut plus faire peur à personne. C'est en sorte un antifascisme de tout confort et de tout repos. Je suis profondément convaincu que le vrai fascisme est ce que les sociologues ont trop gentiment nommé la société de consommation.

"Le fascisme, je tiens à le répéter, n'a pas même au fond été capable d’égratigner l'âme du peuple italien, tandis que le nouveau fascisme, grâce aux nouveaux moyens de communication et d'information (surtout justement la télévision), l'a non seulement égratignée, mais encore lacérée, violée, souillée à jamais."

"Le centralisme fasciste n’a jamais réussi à faire ce qu’a fait le centralisme de la société de consommation [...] Le fascisme proposait un modèle, réactionnaire et monumental, qui est toutefois resté lettre morte. Les différentes cultures particulières (paysanne, prolétaire, ouvrière) ont continué à se conformer à leurs propres modèles antiques : la répression se limitait à obtenir des paysans, des prolétaires ou des ouvriers leur adhésion verbale. Aujourd’hui, en revanche, l’adhésion aux modèles imposés par le Centre est totale et sans conditions. Les modèles culturels réels sont reniés. L’abjuration est accomplie."

"On peut donc affirmer que la « tolérance » de l’idéologie hédoniste, défendue par le nouveau pouvoir, est la plus terrible des répressions de l’histoire humaine. Comment a-t-on pu exercer pareille répression ? A partir de deux révolutions, à l’intérieur de l’organisation bourgeoise : la révolution des infrastructures et la révolution du système des informations. Les routes, la motorisation, etc. ont désormais uni étroitement la périphérie au Centre en abolissant toute distance matérielle. Mais la révolution du système des informations a été plus radicale encore et décisive. Via la télévision, le Centre a assimilé, sur son modèle, le pays entier, ce pays qui était si contrasté et riche de cultures originales. Une œuvre d’homologation, destructrice de toute authenticité, a commencé. Le Centre a imposé - comme je disais - ses modèles : ces modèles sont ceux voulus par la nouvelle industrialisation, qui ne se contente plus de « l’homme-consommateur », mais qui prétend que les idéologies différentes de l’idéologie hédoniste de la consommation ne sont plus concevables. Un hédonisme néo-laïc, aveugle et oublieux de toutes les valeurs humanistes, aveugle et étranger aux sciences humaines."

 ...
 
"Un personnage comme Mussolini serait inconcevable aujourd'hui, du fait de l’irrationalité et de la nullité de ce qu'il dit et parce qu'il n'y aurait aucune place ni crédibilité pour lui dans le monde moderne. La télévision suffirait à le rendre vain, à le détruire politiquement. (...) Ses techniques convenaient pour un chef sur une estrade devant une foule, mais elles ne marcheraient absolument pas devant un écran." Changement total dans notre façon d'être et de communiquer.

Autre passage sur le néo-fascisme, tel que Pasolini le conçoit : la société de consommation. 

"Le fascisme avait fait de ces foules, des guignols, des serviteurs, peut-être partiellement convaincus mais il ne les avait pas atteint dans le fond de l'âme. En revanche, le nouveau fascisme, la société de consommation a profondément transformé les jeunes, elle les a touchés dans ce qu'ils ont de plus intime, elle leur a donné d'autres sentiments, d'autres façons de penser, de vivre, d'autres modèles culturels. Il ne s'agit plus comme à l'époque Mussolinienne, d'un enrégimentement superficiel mais réel qui a volé et changé leur âme Ce qui signifie en définitive que cette civilisation de consommation est une civilisation dictatoriale. En somme, si le mot fascisme signifie violence du pouvoir, la société de consommation a bien réalisé le fascisme. Les démocrates chrétiens sont devenus les véritables fascistes.Colères focalisées sur les fascistes archéologiques alors que les véritables fascistes sont au pouvoir."

Source : Extraits, "Écrits corsaires", 1973-1974, recueil publié en 1975 (1ère édition)





 


Pasolini - Évangile selon saint Matthieu



                                                 
                                                        31 octobre 1975, dernier entretien


                                            
                                                            Pasolini, prophétique...

lundi 18 mai 2009

Féminisme et études de genre, ou quand les "grandes bourgeoises" s'expriment au nom de toutes les femmes


Critiquer le féminisme ou les études de genre (gender studies) ce n'est évidemment pas critiquer les femmes.
Critiquer le féminisme (ou ses excès en tout cas) ce n'est pas remettre en cause l'égalité homme-femme et les
droits fondamentaux qui en découlent ou bien encore la place de chacun dans nos sociétés. On peut déjà
anticiper des objections du style : "mais comment savoir quelle est la place de chacun dans nos sociétés?",
"tout est relatif ", etc. Disons que l'objectif de ce court article est de montrer les contradictions voire les
aberrations qui ressortent de certains discours.
Or donc, le fait de mettre -comme certains démagogues- sur le même plan lutte contre le racisme et
féminisme, par exemple relève de l'imposture totale. Une question s'impose alors : les féministes ont-elles
jamais participé à libérer qui que ce soit, à part elles-mêmes (déjà libérées par ailleurs?), et à protéger leurs
intérêts de classe?

1) Considérations sur les fondements du féminisme

Le féminisme moderne qu'il soit libéral, radical, socialiste ou "psychanalyste et politique" (retracer
l'intégralité de l'histoire du féminisme ici ne serait pas d'un intérêt majeur pour notre exposé) est un courant de pensée, une idéologie, un combat, qui prend racine dans les milieux de la grande bourgeoisie, américaine et d'Europe de l'Ouest, dans les années 60/70 du XXème siècle. Sachons au moins que le MLF, représentatif de ce combat, organe (sans jeux de mots graveleux) réunissant différentes tendances en son sein fut largementfinancé par les grosses fortunes transnationales (capitalistes donc) à la Rockefeller. Voir l'interview du réalisateur/producteur américain Aaron Russo, ami de Nick Rockefeller, à ce sujet :
"Les deux raisons originelles pour lesquelles l'élite finançait la libération des femmes, l'une parce qu'avant la
libération des femmes les banquiers ne pouvaient pas imposer la moitié de la population, et la deuxième
parce cela leur a permis de recevoir des enfants plus jeunes à l'école, permettant leur endoctrinement dans
l'acceptation de l'État comme première famille, démolissant le modèle traditionnel de la famille."
Interview par Alex Jones, 2007
Ses propos pourraient paraître relever de l'affabulation, si Gloria Steinem, une des pionnières des mouvements féministes n'avait elle aussi fait des déclarations allant dans le même sens...
Malgré les différentes courants traversant la "nébuleuse féministe" on peut, néanmoins, retenir quelques
éléments récurrents qui leur sont communs à tous :

Un des postulats des féministes modernes est que les dynamiques de l'oppression des femmes si elles ne sont
pas indépendantes des considérations de classes dépassent, en tout cas, ces opposition de classes.
Ces féministes considèrent qu'en outre, que le patriarcat est a-historique et n'a jamais évolué. L'oppression de la femme au sein du modèle sociétal/familial patriarcal serait constant. Ce qui est faux. L'observation des
évolutions de la famille ouvrière tout au long du XXème siècle atteste de changements fondamentaux au sein
de celle-ci.
Ce corpus d'idées et les combats que constituent le féminisme (radical en tout cas) ont abouti à ce que l'on a
pu nommé de la "collaboration de classe" ; bourgeoises et ouvrières voyant dans l'homme ouvrier besogneux
ou dans le patron multi-millionnaire un seul et même ennemi.
Il découle de cela une suite de contre-vérités assénées à des générations de femmes comme "l'homme est
violent, c'est un prédateur", "si le monde était dirigée par des femmes tout irait pour le mieux dans le meilleur
des mondes" (pour s'en "convaincre", rappelons le bilan socio-économique des années Tatcher, celui de
Madeleine Albright en matière de politique étrangère étatsunienne...les pauvres civils serbes s'en souviennent
encore (et aussi (1)) ou celui de Condoleezza Rice dans le même domaine, etc.)

Il n'existe pas, en réalité, de solidarité de sexe qui ne relèverait pas de la manipulation des femmes issues des
classes populaires par une élite bourgeoise. Les comportements des un(e)s et des autres ne peuvent (en
théorie) qu'être avant tout conditionnés par l'appartenance à une catégorie/classe sociale, même aujourd'hui ou l'affaiblissement de la conscience de classe est avéré.
Or donc, s'il existe des intérêts de classe encore conscients dans les milieux bourgeois, il n'en est pas de même dans les milieux moins favorisés. Nous assistons, en effet, depuis 30 ans environ à une moyennisation de la société française et une aspiration des classes moyennes (majoritaires en France) émergentes depuis le début des années 70 à rejoindre le monde de la petite bourgeoisie et son confort matériel et intellectuel, nous l'avons dit dans un précédent article.
La seule catégorie ou plutôt classe sociale, encore solidaire (i.e. "consciente"), n'est-elle pas la bourgeoisie (de gauche ou de droite, celle montante depuis 40 ans ou celle qui était déjà en place avant 68, donc) liée par uneespèce de consensus mou sur la plupart des questions sociales, économiques et sociétales (i.e les valeurs)?
"La femme" n'est donc, évidemment, pas une catégorie sociale car il n'existe pas de de "complicité" de fait, de connivence politique et d'intérêts communs entre, par exemple, une femme aide-ménagère, une cadre du
tertiaire (professeur, journaliste, médecin etc.) et une rentière.
La fiche de paie qui "tombe" chaque mois pour chacune d'entre elles atteste indéniablement de cet état de fait.

En outre, s'il existait une condition féminine partagée par toutes, existerait-il une condition masculine? Posons
nous cette question simple alors : quel intérêts communs partagent l'homme ouvrier, celui exerçant une
profession libérale et le patron d'une firme transnationale? Aucun assurément, alors comment accréditer la
thèse d'une connivence, d'une "communauté de femmes" partageant des intérêts communs?
Concernant la question de la parité/mixité, posons simplement cette question, sans trop nous étendre sur le
sujet : quels intérêts y-a-t-il à substituer un homme par une femme, elle aussi, issue d'un "milieu bourgeois
affairiste" à la tête d'une entreprise transnationale, par exemple ? Ne défendent-ils pas les mêmes intérêts ?
Être gouverné par Margaret Thatcher est-ce réellement bien mieux que de l'être par Ronald Reagan quand on
appartient à un milieu "économiquement faible"...?
Par suite, la "condition féminine" tout comme la "condition masculine" en tant que catégories liées par un
même sentiment d'appartenance, un même "destin" n'a pas d'"existence propre", ne correspond à aucune
réalité conceptuelle solide résistant à une analyse approfondie de ses fondements et encore moins à une réalité factuelle.
Par ailleurs, ce discours qui consistent à dire "les femmes gagnent moins que les hommes", relève là encore de la démagogie de classe. Il est faux dans le sens ou pour les métiers liés à "la rente" (peut-on parler de métier?), les patron(ne)s, les artistes (écrivain(e)s, chanteurs, chanteuses) ou dans les métiers de la fonction publique ces inégalités de genre n'existent absolument pas. Rien n'indique, par ailleurs, qu'un "agent de service" masculin gagnerait plus que son homologue féminin.
Le problème fondamental de nos sociétés se situe donc bien au niveau de la parité riche/pauvre et non pas de la parité homme/femme.
Penchons nous aussi sur le néo-féminisme des Virginie Despentes ou Joy Sorman, "idéologie" de pissotière,
sortie des cerveaux des rejetons anémiés de la bourgeoisie parisienne post-soixanthuitarde, prônant la
virilisation des femmes et la féminisation des hommes, ou encore "la sortie de la partition naturaliste où les
femmes ne seraient plus que des cerveaux et les hommes pourraient louer des utérus" [sic]...pseudo-idéologie, donc, qui cumule toutes les transgressions aujourd'hui normatives...
Disons toutefois et pour conclure cette partie qu'une lecture purement sociale du phénomène féministe en
France est, sans doute, aujourd'hui limitative du fait notamment de l'ethnicisation des rapports sociaux. Sans
doute, pourrait-on utiliser aussi une "lecture ethnique" (ou concilier "lecture ethnique et sociale") pour
montrer les divergences entre les intérêts et aspirations des femmes héritières de cultures différentes qui composent, aujourd'hui, la société française.

2) Les études de genres

Le combat féministe relayé par les études de genres (gender studies) qui consiste à vouloir corriger les
inégalités sociales liées à l'appartenance à un genre (féminin en l'occurrence) relèverait, par suite, elles-aussi
du non-sens le plus total. La lecture de la plupart de ces études laisse apparaître au mieux la vacuité des thèses défendues par leurs auteur(e)s. La grande prêtresse de ce mouvement académiques est bien sûr la sophiste Judith Butler (cf. "Trouble dans le genre. Pour un féminisme de la subversion", 1990)
On trouve, par exemple, une géographie féministe, apparue dans les années 1970/80, un des courants issu de la "nouvelle géographie" qui rejette largement les fondements de la géographie classique (celle des
nomenclatures, des tonnes de charbon produites et des kilos de blés exportés). Cette géographie féministe est  représentée par des gens comme Gilian Rose.
 On se demande si l’'homo oeconomicus* est un homme ou une femme. Ici, on raisonne sur l'appartenance à un genre qui doit déterminer les conditions de vie de l'individu. La société est perçue par les auteurs de ce courant comme patriarcale, "phallocentrique", injuste envers les femmes donc et on va dénoncer cette supposée discrimination de genre. L’'espace est supposé être impliqué dans la définition du genre et supposé participer à la reproduction des rapports de domination.
Cette école de géographie, relativement marginale a donné lieu à certains écrits assez savoureux.
Ainsi, dans les études de genre pratiquée par la géographie le ridicule ne tue pas, à moins qu'il ne s'agisse de
propos à prendre au second degré, d'une géographie du second degré donc, une géographie de l'absurde? : "Il est donc [...] moins question de sexualité que d’anatomie du sexe, celle qui veut que les hommes fassent pipi debout et les femmes assises. Quoique ! Ne revient-il pas aux architectes, notamment femmes et féministes,d’imaginer des lieux d’aisance alternatifs, et aux organisateurs et organisatrices de manifestations
accueillant beaucoup de femmes de tenter l’'expérience du changement ?"
http://hal.archives-ouvertes.fr/docs/00/36/44/86/PDF/espace_sexualite.pdf
Cet autre extrait est aussi représentatif de ce courant : [...] "(Comment l’espace est-il genré ? Quel est
l’impact du sexe de l’architecte sur la production d’un tel espace ? …) ainsi que le postulat féministe de
l’importance des relations de pouvoir dans cette relation entre genre et espace. [...] s’inspire de Lefebvre
pour avancer l’idée que l’idéologie qui divise la ville entre espace public et espace privé, production et
reproduction, hommes et femmes est à la fois patriarcale et capitaliste. Parce qu’ils diffèrent, les espaces
alloués aux hommes et aux femmes jouent un rôle dans la production et le maintien des relations
hiérarchiques de genre..."
http://hal.archives-ouvertes.fr/docs/00/36/44/86/PDF/espace_sexualite.pdf
Qui a dit que les chercheurs en sciences sociales ne trouvaient jamais rien et se réfugiaient dans les idées
pures sans avoir jamais quoi que ce soit de concret à proposer ?

Enfin, en guise de conclusion temporaire, demandons-nous en quoi notre société française est-elle réellement
patriarcale aujourd'hui? Depuis 40 ans, les structures "traditionnelles" permettant, soit-disant, la pérennisation
du patriarcat ont largement reculé dans ce que nous nommons communément "Occident" : la famille, le
couple hétérosexuel, le mariage (religieux surtout), l'Eglise en tant qu'institution influençant sur les décisions
individuelles etc. alors qu'a contrario les pratiques, autrefois considérées comme marginales, sont aujourd'hui
acceptées par tous : union libre, émancipation des "minorités sexuelles", familles recomposées ou
monoparentales où la femme est chef de famille (et pas forcément précaires, loin s'en faut), "libre disposition"
de son corps etc. Ainsi, déclarer de nos jours, par exemple, à ses camarades d'école que ses parents n'ont
jamais divorcé est presque suspect...
Les mouvements féministes n'auraient-ils pas simplement enchaîné les femmes issus des milieux les plus
défavorisés à leur patron sous prétexte de les libérer d'une supposée dépendance envers leur mari ? La réponse peut paraître évidente...

Aussi, les auteur(e)s pratiquant, de nos jours, les études de genre auraient-ils (elles), eux(elles)-aussi leur lutte de retard, tout comme la gauche "bobo-libertaire" en France (i.e. extrême-gauche ou gauche de gouvernement largement solidaires des premiers cités, d'ailleurs) avec ses luttes anti-fascistes (qui consistent, en fait, àconsidérer comme fasciste tout ce qui s'oppose à ses valeurs) et anticléricale ou encore l'extrême-droite (un certain courant au moins) avec son combat anti-communiste d'arrière-garde et sa "menace rouge"?

(1)Le 27 septembre 1996, les Talibans prennent Kaboul, elle déclare alors que « c'est un pas positif » [SIC]
fort de son soutient politique, les fondamentalistes s'emparent dès lors du pouvoir à Kaboul. Nous connaissons la suite...
*« Le mythe de l'homo œconomicus et [de] la rational action theory [sont des] formes paradigmatiques de
l'illusion scolastique qui portent le savant à mettre sa pensée pensante dans la tête des agents agissants et à
placer au principe de leurs pratiques, c'est-à-dire dans leur « conscience », ses propres représentations
spontanées ou élaborées ou, au pire, les modèles qu'il a dû construire pour rendre raison de leurs pratiques
». Pierre Bourdieu, 2000, Les structures sociales de l'économie, Seuil, Paris.
Copyright © J-M Lemonnier mai 2009 publié sur blog.fr (plateforme fermée depuis décembre 2015=
par JeanMichelLemonnier @ 18.05.09 - 01:00:18
http://Jean-MichelLemonnier.blog.fr/2009/05/17/feminisme-et-etudes-de-genre-ou-quand-les-grandes-bourgeoises-parl